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C'est pas mon idée !

dimanche 31 décembre 2017

Florilège de l'innovation en 2017

Fin d'année
Pour terminer 2017 en douceur, je vous propose aujourd'hui le désormais traditionnel top 5 des billets de « C'est pas mon idée ! » les plus lus au cours de cette année, qui, d'une manière générale, me semble avoir été moins prolifique que les précédentes en innovations transformantes et plus consacrée à des actions de consolidation.

Apple Pay prend la cinquième position de ce palmarès, sur une note pour le moins mitigée, entre le constat d'un décollage (encore) raté pour le paiement via mobile, alors que les transactions sans contact par carte paraissent enfin s'imposer, et une réticence marquée des grandes banques françaises à adopter la solution de la marque à la pomme. Notons toutefois que depuis cet article, rédigé cet été, la situation est peut-être en voie de déblocage, puisque Société Générale devrait bientôt la proposer à ses clients.

La quatrième place du classement revient à AXA France avec une réflexion en profondeur, par son directeur digital, Antoine Denoix, sur l'entrée de l'assureur dans une nouvelle ère de sa transformation « digitale », plus industrielle et focalisée sur la valeur produite. Avec l'atteinte d'une certaine maturité, la culture du changement permanent deviendrait la norme pour l'entreprise, ce qui pourrait d'ailleurs expliquer l'apparent ralentissement de l'innovation dans les grands groupes ces derniers mois.

Fait relativement rare dans l'histoire de ce blog, c'est une une startup qui monte sur la troisième marche du podium. N26, en l'occurrence, persiste à démontrer avec insolence que le principe fondamental de l'innovation consistant à remettre en cause toutes les croyances du passé est également applicable dans le secteur financier. De la prise en compte des contraintes réglementaires aux choix technologiques, la néo-banque allemande devrait constituer une source d'inspiration pour les acteurs traditionnels.

AXA est présente une seconde fois au palmarès, avec la seule véritable innovation du lot, due à sa filiale singapourienne. L'ouverture d'un portail d'API est en effet une initiative rare dans les grands groupes financiers, qui ne parviennent pas toujours à en percevoir les opportunités. Ici, elle offre une intéressante perspective sur une autre approche de l'assurance, intégrée de manière transparente dans les actes de la vie quotidienne et non plus disponible seulement comme un produit indépendant sans attrait.

Enfin, l'article le plus lu de l'année est celui qui relate la déception qu'a occasionné pour moi le lancement d'Orange Bank, l'événement le plus attendu de l'hexagone en 2017. Celle qui devait être la première néo-banque sérieuse en France n'est pas parvenue à tenir sa promesse, qui s'est transformée en une simple offre bon marché de plus. Apparemment, ce ne sont pas les idées qui manquent, mais l'exécution ne suit pas, trop conforme aux standards d'un grand groupe et insuffisamment agile pour innover…

Je termine ce dernier billet de l'année avec des remerciements renouvelés aux lecteurs toujours plus nombreux de « C'est pas mon idée ! ». Je vous souhaite une excellente année 2018, pleine de bonheur et d'innovations, petites et grandes…

Bonne année 2018

samedi 30 décembre 2017

SunTrust démystifie les finances personnelles

SunTrust
La grande banque américaine SunTrust s'est fait, de longue date, une spécialité d'aider ses clients à développer leur éducation financière à travers, notamment, une plate-forme dédiée, « onUp Movement ». Depuis peu, elle a enrichi cette dernière d'une nouvelle composante, capitalisant sur une approche ludique pour plus d'efficacité.

Après une courte période d'engouement, il y a quelques années, la ludification de l'apprentissage s'est désormais faite plus discrète, en dehors de quelques niches spécifiques. Rétrospectivement, cet abandon est facile à expliquer : en croyant qu'il suffisait de quelques mécanismes simples pour séduire les utilisateurs (par exemple des animations basiques et des récompenses symboliques), la plupart des initiatives ont lamentablement échoué et ont logiquement fini par être abandonnées.

Sous cette perspective, le « onUp Challenge » de SunTrust peut être considéré comme représentatif d'une deuxième génération de solution, dans un domaine – la gestion de finance personnelles – qui a connu une multitude de tentatives diverses et variées. Il n'est donc plus question de mascarade de jeu vidéo et même si les badges restent présents, ils ne servent qu'à marquer l'accomplissement d'étapes successives, sans emphase particulière. En revanche, l'accent est maintenant mis sur la personnalisation.

SunTrust onUp Challenge

Le concept consiste en effet à mettre en scène les bonnes pratiques quotidiennes vis-à-vis de l'argent dans le contexte individuel du « joueur » et non dans un environnement générique abstrait dans lequel il est souvent difficile de se projeter. Avant de commencer, il doit ainsi sélectionner ses principales priorités dans la vie, qui servent à déterminer ses « valeurs » et orientent la suite de son parcours. Il bénéficiera, entre autres, de recommandations adaptées à ses préférences à chaque fois que cela est possible.

Quel que soit le profil de l'utilisateur, tous les aspects des finances personnelles sont abordés : commencer à épargner, gérer un budget, maîtriser les dettes, établir un matelas de sécurité, investir pour l'avenir, acheter une résidence et cultiver son potentiel. Au fil de chacun d'eux, des contenus informatifs et éducatifs sont proposés, sous forme de listes de points clés, d'articles, d'infographies, de vidéos… Surtout, des actions concrètes sont suggérées pour valider les progrès accomplis : ouvrir un compte d'épargne, mesurer son patrimoine net, interroger son score de crédit, vérifier ses assurances…

En contrepoint des dérives passées de la ludification, la démarche de SunTrust nous rappelle utilement deux principes pédagogiques essentiels. D'une part, l'utilisation de techniques de jeu n'est qu'un moyen de retenir et faire revenir l'utilisateur et en aucun cas un élément constitutif de l'apprentissage. D'autre part, aucune leçon ne sera jamais plus efficace que la mise en pratique des concepts inculqués. Ils mériteraient d'être gardés en mémoire quand sont définies les priorités de cursus de formation en tout genre…

vendredi 29 décembre 2017

Comment ré-inventer l'agence bancaire

McKinsey Insights
Une autre année se termine et l'avenir de l'agence reste toujours au cœur des questions stratégiques que se posent toutes les banques à réseau. Au fil d'une synthèse relativement complète sur le sujet, les consultants de McKinsey soulignent quelques-uns des défis qu'elles doivent relever pour maintenir leur compétitivité.

Les constats dressés par les auteurs – dont une partie émanent d'une enquête menée auprès de 36 000 consommateurs dans 11 pays européens, les États-Unis, le Canada et l'Afrique du Sud – ne réservent pas de surprise. Ainsi, même si la transition vers les services « digitaux » se confirme et réduit les besoins de contact face à face avec un interlocuteur humain, une part importante de la population continue à affirmer son attachement à une implantation physique, de proximité, notamment pour du conseil.

Devant cette attente, les difficultés s'accumulent. Les coûts des réseaux sont considérables et sont de plus en plus difficiles à justifier face à la baisse de fréquentation, surtout quand elle se combine avec des exigences d'ouverture à des horaires étendus. D'autre part, les initiatives de modernisation engagées pour pallier à la désaffection restent souvent ponctuelles et beaucoup d'agences sont vieilles et démodées, sans perspective de réaménagement à court terme car l'investissement serait trop lourd.

Malgré tout, les institutions financières traditionnelles, y compris quand elles s'engagent résolument dans un modèle de relation « digitale » et qu'elles réduisent fortement leur empreinte physique, ne sont pas prêtes à abandonner leur réseau, dont elles considèrent qu'il constitue un différenciateur majeur en comparaison des nouveaux entrants. Et il est vrai que la valeur de leur présence dans les villes est réelle, par exemple en termes de marketing ou de resserrement de la confiance de la clientèle.

Les recommandations de McKinsey pour résoudre la quadrature du cercle sont hélas assez convenues. Il est donc d'abord question de rationaliser les réseaux, tout en admettant que nombre de banques ont atteint une limite en la matière. Il faudrait ensuite mieux capitaliser sur l'innovation technologique, en particulier au bénéfice de l'expérience client, bien que l'exemple cité du robot Pepper pour l'accueil paraisse anecdotique (voire caricatural). Plus sérieuse, l'ambition de créer de vrais parcours omni-canal, transparents, adaptés à différents profils, est probablement une priorité incontournable.

L'ensemble donne un peu une impression désespérée : les faits sont têtus et il ne semble pas possible de trouver une solution magique à long terme. Il ne resterait alors qu'à mettre en place les moyens permettant d'assurer une transition en douceur vers l'inéluctable disparition plus ou moins extensive des agences. Ce sentiment est en outre renforcé par une autre faiblesse du modèle de banque à réseau, clairement identifiée mais à laquelle aucune réponse simple ne paraît pouvoir être trouvée…

En effet, la critique la plus fréquemment formulée (quoique indirectement) à l'égard des banques est l'absence de cohérence dans l'expérience utilisateur : d'une agence à l'autre et d'un conseiller à l'autre, la qualité de la relation varie et la satisfaction est au rendez-vous ou non. Cette fragilité, inhérente au maillage géographique, devient d'autant plus sensible que les clients attendent de leurs interlocuteurs une expertise plus pointue et une empathie plus prononcée, qu'il est difficile à la fois de délivrer et de mesurer.

Plus que de la rationalisation, l'innovation ou l'intégration, la survie de l'agence et de son avantage concurrentiel dépendra avant tout de la capacité des banques à offrir une expérience homogène sur tous les canaux et dans tous ses points de présence. Celle-ci passe bien sûr par un ensemble de facteurs techniques – de l'aménagement intérieur aux équipements installés – mais aussi par les qualités et les compétences des collaborateurs, qui ne peuvent se résumer à des techniques de vente basiques.

Agence ING Belgique

jeudi 28 décembre 2017

Vers une Europe de la FinTech ?

Europe
Après avoir établi, non sans difficultés, un marché unique des paiements qui doit s'affermir dans les prochains mois, la Commission Européenne s'apprêterait maintenant, selon le Financial Times, à instaurer un régime commun pour les acteurs de la finance participative. L'enjeu est de taille, puisque ce qui se joue est la compétitivité de l'Union.

Une proposition de réglementation pourrait donc voir le jour dès le début de l'année 2018. Elle viserait à créer une sorte de licence paneuropéenne permettant aux jeunes pousses agréées du crowdfunding et du crédit de pair à pair (P2P) de déployer leurs services dans les 28 pays de l'Union sans avoir à se préoccuper des spécificités administratives locales. Il ne s'agirait en outre que d'une première étape avant d'envisager une extension de l'approche aux nombreux autres domaines de la FinTech.

L'objectif de ces initiatives est double. D'un côté, les édiles européens désirent poursuivre leur entreprise d'ouverture du secteur financier à la concurrence et il leur faut, pour ce faire, favoriser le développement d'alternatives crédibles. D'autre part, il commence à poindre une inquiétude vis-à-vis de l'hégémonie technologique des États-Unis et de l'émergence de géants asiatiques (notamment chinois), toutes deux susceptibles de menacer la place des banques européennes dans la finance mondiale.

Hélas, en dehors de quelques rares exceptions (TransferWise, N26…), les jeunes pousses qui éclosent sur le continent exposent une faiblesse structurelle en concentrant presque systématiquement leurs efforts d'expansion sur leur marché national plutôt que de se positionner d'emblée sur l'ensemble du continent, ce qui limite automatiquement leur marché potentiel et leurs perspectives de croissance. La Commission s'attaque logiquement à une raison supposée de cette « timidité », la complexité réglementaire.

Il ne faut toutefois pas se faire trop d'illusions sur l'effet possible d'une uniformisation des formalités et des exigences à l'échelle de l'Europe, même si elle ne peut avoir qu'un impact positif. Il restera d'autres handicaps à lever et d'autres obstacles à franchir. En particulier, les différences culturelles entre les 28 représentent certainement un des freins les plus importants au franchissement des frontières ; pour les entrepreneurs, qui ne savent pas toujours comment s'adresser à des consommateurs qu'ils ne connaissent pas, et pour ces derniers, qui n'accordent pas facilement leur confiance.

Le cas des États-Unis offre d'ailleurs un contre-exemple révélateur : ses startups profitent avant tout d'un marché de plus de 320 millions de personnes partageant, dans une large mesure, une même culture, de mêmes habitudes, un même mode de vie. Celles qui se lancent dans les services financiers, en particulier, doivent souvent faire face à un imbroglio de réglementations et d'obligations spécifiques à chaque état, qui, toutefois, les empêchent rarement de s'implanter sur la totalité du territoire. La compétitivité de l'Europe doit donc aussi passer par une convergence des comportements.

Naturellement, le changement de culture ne se décrète pas comme une nouvelle réglementation… Alors, il faudra probablement du temps avant que l'Europe de la FinTech ne se concrétise. Mais peut-être les acteurs nationaux existants pourraient-ils stimuler la transition en essayent eux-mêmes de faire traverser les frontières à leurs modèles d'inspiration locale, de combiner des approches issues de différentes origines… Pourquoi ne serait-il pas possible de créer des modèles innovants paneuropéens ?

Commission Européenne

mercredi 27 décembre 2017

Pourquoi la consommation électrique du bitcoin est problématique

Bitcoin
Parmi les polémiques entourant la popularité croissante du bitcoin, celle qui touche à la consommation énergétique me semble être la plus critique car, autant par le sérieux du sujet que par la légèreté avec laquelle de nombreux observateurs l'écartent, elle constitue une véritable menace pour l'avenir même de la cryptomonnaie.

La situation actuelle devrait déjà suffire à soulever l'indignation de quiconque a la moindre sensibilité environnementale : que l'estimation selon laquelle les opérations du réseau bitcoin absorbent l'équivalent de la consommation électrique du Maroc soit juste ou surestimée, la seule idée qu'un instrument financier pratiquement sans fonction économique (à ce jour) autre que la spéculation soit un gouffre énergétique pose une grave question. Même pour ce rôle, d'autres supports seraient plus appropriés.

Cependant, indépendamment des dérives d'usage par rapport à l'idéal initial d'un système de « cash électronique » inscrit dans son texte fondateur, les récents développements tendent à montrer un défaut intrinsèque au bitcoin que, malheureusement, beaucoup de ses défenseurs refusent d'admettre : selon toute vraisemblance, sans changement radical d'approche, son succès ne pourra que s'accompagner d'une croissance de la consommation électrique, incompatible avec les enjeux du XXIème siècle.

Pour comprendre le raisonnement, il suffit de revenir aux basiques de la cryptomonnaie. Commençons par rappeler que le réseau informatique qui la gère est constitué d'une multitude de machines indépendantes qui, grâce à des calculs plus ou moins complexes et énergivores (ce qu'on appelle le « minage »), garantissent l'immutabilité des transactions enregistrées, moyennant une rémunération qui prend, entre autres, la forme d'une commission. Tout le reste est affaire, classique, d'offre et de demande…

Ainsi, la popularité du bitcoin tend logiquement à faire croître le nombre d'opérations. Or la technologie utilisée introduit une limite structurelle à la quantité de transactions qu'il est possible d'enregistrer durant une période donnée (et même si les paramètres étaient changés, il subsisterait toujours un plafond). En conséquence, il apparaît un phénomène de concurrence entre les participants, qui se résout naturellement par une augmentation de tarif : la commission à payer pour valider un transfert augmente.

Inévitablement, cette inflation attire les fournisseurs : le « minage » devenant de plus en plus profitable, il est évidemment tentant de déployer toujours plus de machines sur le réseau pour capter cette manne financière. Il faut noter à ce stade que le nombre de nœuds de calcul est aussi un facteur important de la confiance qui peut être accordée au bitcoin, car il détermine le seuil de puissance qu'il faudrait mettre en œuvre pour « pirater » le système. Plus les sommes circulant sont élevées, plus ce niveau doit être élevé pour décourager les fraudeurs potentiels (qui pourraient être des états).

Ce sont donc deux raisons fondamentales qui justifient une spirale de puissance informatique et de la consommation électrique associée, dont il paraît difficile de sortir sans remettre en cause le principe du bitcoin. Le mécanisme de « preuve de travail » (le travail de calcul, en l'occurrence), en particulier, est au cœur de l'imperfection et aucune alternative ne paraît aujourd'hui offrir une réponse robuste et efficace. Quoi qu'il en soit, il faut impérativement arrêter de croire que le problème se résorbera de lui-même !

Bitcoin

mardi 26 décembre 2017

Comment ne rien apprendre de l'expérience

Île de France Mobilités
L'actualité étant traditionnellement calme en fin d'année, voici une occasion rêvée de revenir sur un sujet plus ancien et légèrement décalé par rapport à l'innovation dans les services financiers que je traite habituellement : cet automne, Île-de-France Mobilités (ex-STIF) annonçait [PDF] l'arrivée des titres de transport sur smartphone

Au premier abord, sans qu'il s'agisse d'une révolution, la nouvelle devrait réjouir les habitants de la région parisienne, qui pourront bientôt oublier leurs passes Navigo à la maison et emprunter la quasi-totalité des transports en commun du territoire armés de leur seul téléphone mobile. Plus de 12 ans après l'irruption de la technologie sans contact dans le métro, on peut se dire qu'il était temps de franchir cette nouvelle étape. Et on pourra encore s'étonner de devoir attendre l'été 2019 pour en profiter…

Malheureusement, ces délais ne semblent pas avoir été mis à profit pour capitaliser sur l'expérience accumulée aux 4 coins du monde en matière de mobilité. Les choix technologiques des autorités sont en effet ceux d'un autre âge (vous souvenez-vous de Cityzi ?), ignorant superbement tous les enseignements qui auraient pu être tirés d'une décennie d'échecs retentissants et, surtout, des progrès qui ont été accomplis depuis et laissent espérer que le paiement sans contact via mobile puisse enfin se développer…

Car, alors que (presque) tous les acteurs de la terre ont abandonné cette voie, nos brillants experts d'Île-de-France Mobilité ont donc choisi d'implémenter leur application de gestion des titres de transport dans la carte SIM. Et si cette solution n'est plus en vogue depuis des années, ce n'est pas uniquement parce qu'elle introduit une dépendance vis-à-vis des opérateurs de téléphonie mobile. Les expérimentations passées ont également montré qu'elle induisait des complexités et des surcoûts de mise en œuvre.

Navigo

Alors, nous sommes prévenus : initialement, le service ne sera accessible qu'à environ 900 000 franciliens, sur un total de 3 millions d'utilisateurs potentiels. Eh oui, non seulement tous les smartphones ne seront pas compatibles (l'iPhone, entre autres, restant fermé à ce type d'application) mais il sera de surcroît réservé aux abonnés Orange possédant une carte SIM adaptée… Dans tous les cas, les utilisateurs occasionnels, notamment étrangers, pourront faire une croix sur le système : comment peut-on mépriser ainsi les millions de touristes visitant la capitale chaque année ?

Avec son projet consternant, Île-de-France Mobilités nous donne le triste exemple d'une démarche ignorant une règle basique de l'innovation : connaître les précédents et apprendre des expériences antérieures (qui, en l'occurrence, sont innombrables). L'organisme s'engage de la sorte dans une impasse en reproduisant à l'identique une approche ayant démontré qu'elle ne fonctionne pas – avec des partenaires dont les intérêts peuvent être questionnés – et paraît méconnaître 10 ans d'avancées technologiques, dont la transition des applications de la carte SIM vers le cloud.

lundi 25 décembre 2017

De la modularité à la personnalisation

Personnalisation
Quand les consultants de McKinsey demandent aux consommateurs ce qu'ils attendent des entreprises avec lesquelles ils sont en relation, deux qualités principales ressortent : commodité et personnalisation. Cette dernière est probablement la plus difficile à délivrer, ce qui explique que la plupart des initiatives actuelles sont extrêmement maladroites.

Mais, avant de s'intéresser aux réponses apportées à leurs clients, en particulier par les institutions financières, commençons d'abord par clarifier ce qu'ils désirent vraiment, qu'on traduit par cette idée de personnalisation. Pour la résumer, il s'agit de s'assurer que chaque interaction est établie de manière à s'inscrire le plus précisément possible, en toute transparence, dans le contexte immédiat de l'individu auquel elle s'adresse : son besoin, ses envies, ses habitudes, ses préférences, sa situation, son environnement…

Un contre-exemple de personnalisation serait un vendeur (dans une boutique de mode ou dans une agence bancaire) recommandant le même produit à tous les visiteurs. L'attitude souhaitée serait, au contraire, un spécialiste sachant déterminer d'un coup d'œil les vêtements qui correspondent à un style et à une silhouette ou un conseiller en patrimoine ayant pris le temps de découvrir et comprendre les comportements financiers de son client et s'attachant à lui proposer les meilleures solutions dans sa « zone de confort ».

Or qu'en est-il aujourd'hui dans les banques ? L'absence totale de personnalisation reste souvent la norme, hélas. C'est notamment la raison pour laquelle une d'elles m'envoie, depuis 20 ans, des offres de crédit automobile alors que tout dans mon profil (connu) me désigne comme le prospect le plus improbable et que ce mépris absolu de mes attentes devient insupportable. Cependant, quelques-unes se penchent désormais sur une autre manière de commercialiser leurs produits, plus en adéquation avec le marché.

C'est ainsi qu'est apparu, au cours des dernières années, un concept d'offre modulaire, soit sous forme de packages pré-composés, adaptés à différentes situations (l'étudiant, le jeune qui s'installe, la naissance d'un premier enfant…), soit sur une approche de socle de base (généralement un compte courant et une carte) assorti d'une multitude d'options à panacher à volonté. Logique, n'est-ce pas : puisque les consommateurs veulent de la personnalisation, il faut leur donner plus de choix ? Tragique erreur…

En effet, jamais le client ne réclame plus de possibilités, il désire toujours une et une seule solution : celle qui lui convient parfaitement ! Certes, pour atteindre cet idéal, la banque doit être en mesure de gérer la modularité. Mais il ne lui sert à rien de l'exposer vers l'extérieur. Ce qui lui est nécessaire est une capacité à connaître intimement chaque personne qui s'adresse à elle et savoir lui proposer le « bon » assortiment. Malheureusement, la plupart des initiatives actuelles visent en priorité à optimiser les tarifs, plaçant, de fait, les intérêts de l'organisation devant les besoins du client.

Que les interactions passent par un conseiller humain ou qu'elles soient conduites en ligne ou via une application mobile, elles devraient surtout se concentrer sur l'acquisition d'information et l'analyse des meilleures corrélations avec les solutions à proposer. La tâche parait insurmontable mais elle devient plus facile à appréhender en l'abordant par petites tranches, en expérimentant des cas successifs, reposant sur une situation donnée à laquelle on applique une réponse… dont on évalue les résultats.

Choix

dimanche 24 décembre 2017

La conformité reste à automatiser

Cordium
Tandis que la pression réglementaire s'intensifie sans cesse sur les institutions financières, une enquête menée par Cordium, fournisseur de solutions de gestion de la conformité (GRC), et Aite Group, cabinet d'analystes, révèle quelques faiblesses critiques des processus mis en place dans les entreprises du secteur des marchés de capitaux.

Les exigences réglementaires sont évidemment le centre de toutes les attentions. D'un côté, la multiplication et la complexification permanente des textes en vigueur paraît devenir toujours plus difficile à prendre en compte. De l'autre, les sanctions infligées aux acteurs en cas de manquement à leurs obligations prennent des proportions gigantesques, parfois susceptibles de mettre en cause leur survie. Alors, logiquement, les moyens mis en œuvre pour faire face à ces enjeux sont eux-mêmes considérables.

Pourtant, parmi les 120 entreprises consultées par Aite dans le monde entier (dont environ 70% de fonds alternatifs et autres gestionnaires d'actifs), seule une petite minorité (17%) adopte une approche principalement stratégique du sujet. Les autres sont, pour une large part, handicapées par le manque de personnel et, surtout, d'outillage adapté pour répondre sereinement, en temps utile, aux demandes des régulateurs, qu'il s'agisse de rapports récurrents ou de démarches ponctuelles, par exemple en cas d'audit.

Une conséquence tragique du positionnement tactique des institutions financières est leur recours excessif à des processus manuels, pour près de la moitié d'entre elles. Elles ne seraient même que 2% à les avoir totalement automatisés. Une telle ambition peut sembler utopique mais les évolutions technologiques, dont les progrès de l'intelligence artificielle, permettraient aujourd'hui de mieux prendre en compte les besoins, comme l'illustre l'application des solutions de traitement du langage naturel pour l'analyse de l'alignement entre les textes réglementaires et les procédures déployées.

Les modalités de surveillance du respect des contraintes et de mesure des risques de non conformité sont des victimes collatérales du déficit d'automatisation. Elles expliquent notamment que nombre d'établissements (47%) estiment être dans une logique essentiellement réactive, c'est-à-dire dans l'incapacité de détecter – et, donc, de prévenir – les problèmes avant qu'ils ne surviennent. Elles se résignent ainsi à vivre sous la menace constante de pénalités financières et de leur impact sur leur image.

Il doit exister une autre manière de faire. Comme dans les autres domaines d'activité, l'introduction, dans une vision stratégique, de plus d'agilité, de flexibilité, de modularité…, avec le support de technologies avancées telles que celles que développe le mouvement de la RegTech, représente la clé de la maîtrise de la spirale de la réglementation qui, à défaut de solutions à long terme, sera vouée à une perte totale de contrôle et, potentiellement, à l'effondrement de l'entreprise sous le poids des exigences.

Livre blanc Cordium - Aite Group

samedi 23 décembre 2017

La banque s'ouvrira, de gré ou de force

Max
Propulsé sur le devant de la scène grâce à la nouvelle directive européenne des services de paiement (DSP2), le concept de banque ouverte (« open banking ») entre peu à peu dans les discours des institutions financières. Mais il leur reste un long chemin à parcourir pour dépasser le stade des intentions et en saisir les opportunités.

À écouter les responsables de 75 établissements interrogés par Gartner pour une étude commanditée par l'EFMA, la majorité d'entre eux (90%) affirme préparer leur transformation en banque ouverte d'ici 3 ans. En parallèle, dans leurs prédictions pour 2018, les analystes de Forrester considèrent au contraire que la tendance ne concernera qu'une minorité d'organisations. Selon mes observations, ces derniers sont plus crédibles… et il paraît bien peu probable que la situation s'améliore à moyen terme.

Pour comprendre l'écart de perception entre les deux cabinets, qui ne tient pas qu'à une différence d'échelle de temps (d'ailleurs, pour Gartner, plus de la moitié des transitions seront concrétisées sous un an), il faut d'abord s'attarder sur ce que chacun intègre dans la notion de banque ouverte. Pour les optimistes, la publication d'API (à destination de développeurs tiers, doit-on supposer) suffirait pour justifier le qualificatif. En rester là serait pourtant une erreur, que beaucoup s'apprêtent hélas à commettre.

Ainsi, bien qu'il s'agisse, au sens strict, d'une forme d'ouverture, les programmes qu'engagent actuellement la plupart des banques en vue de leur mise en conformité (avant la mi-2019) avec les exigences de la DSP2 sont loin de prendre en compte toutes les dimensions de la révolution qui se prépare. Car l'enjeu ne se réduit clairement pas à permettre à des acteurs tiers d'accéder aux données des comptes de leurs clients : c'est un modèle opérationnel entièrement nouveau qu'il est question d'inventer.

Comme son nom l'indique (!), l'objectif d'une banque ouverte est de faire disparaître ses murs et ses frontières. Cela vaut d'abord – et ce devrait être le plus facile – en interne : en créant des services accessibles universellement, il devient possible de faire fructifier les collaborations entre les différents métiers, et, de la sorte, stimuler l'innovation transverse ou encore mettre véritablement l'organisation au service du client au lieu de faire perdurer un archipel d'îlots isolés, chacun centré sur un produit.

La carte Max

Surtout, l'ouverture vers l'extérieur est une garantie d'adaptation aux futures évolutions possibles du concept de banque. Alors qu'il est de plus en plus évident que la structure monolithique que l'on connaît aujourd'hui – qui incite le consommateur à s'adresser à un même interlocuteur pour tous ses besoins financiers – est en train de s'estomper et laisse entrevoir, a minima, une coexistence avec d'autres approches, il est essentiel de faciliter une intégration transparente entre tous les services, quels que soient leurs fournisseurs.

C'est bien sur une telle vision que se cristallise une stratégie de banque ouverte et c'est sur ce point que ressort brutalement l'immaturité qui prédomine. Car où sont les établissements qui ne se contentent pas de conformité réglementaire et entreprennent d'explorer les opportunités offertes par la publication d'API, y compris des concurrents ? Qui cherche à expérimenter de nouveaux types de services, aux côtés de ses activités traditionnelles ? En France, seul le Crédit Mutuel Arkéa entre dans cette catégorie.

Son application Max – qui soulève le scepticisme de nombre d'observateurs, et il faut probablement y voir un signe de clairvoyance – constitue une tentative audacieuse de renverser la perspective sur les API : en marge de la prise en compte de la DSP2 dans le métier historique de la mutualiste, l'obligation pour toutes les banques d'ouvrir les données de leurs clients est ici prise comme une occasion extraordinaire d'imaginer et de développer une offre radicalement différente pour les consommateurs.

En résumé, plutôt que d'avancer à leur corps défendant dans le déploiement d'API tactiques, les institutions financières devraient élargir leur horizon à une vraie stratégie de banque ouverte, qui, sur le long terme, les prépareraient à affronter divers scénarios plausibles pour l'avenir de leur industrie, tout en leur procurant, à court terme, des bénéfices tangibles pour leur agilité et leurs capacités d'innovation. Il semblerait que, pour l'instant et sauf exception, l'ambition ne soient pas au rendez-vous dans le secteur.

vendredi 22 décembre 2017

AIG monte en puissance sur les cyber risques

AIG
À l'ère « digitale », les risques liés à la cybersécurité deviennent critiques pour nombre d'entreprises et constituent donc un enjeu majeur dans les compagnies d'assurance. Après une première génération de contrats, relativement basique, AIG dévoilait il y a peu une approche beaucoup plus pointue du sujet, mixant prévention et couverture.

Entre la multiplication des fuites massives d'informations sensibles (dont celle d'Equifax parmi les plus récentes), dans toutes sortes de secteurs, la sophistication croissante des menaces et des malveillances et le renforcement de l'arsenal réglementaire, relatif, par exemple, à la protection des données personnelles (via le RGPD), la cybersécurité est (ou devrait être) aujourd'hui un sujet d'inquiétude dominant dans toutes les organisations. Malheureusement, beaucoup d'entre elles manquent de solutions adaptées.

Depuis quelques mois, les compagnies d'assurance ont commencé à mettre en place des polices destinées à répondre à leur désarroi, en offrant – a minima – des garanties en cas de sinistre, consistant généralement en assistance à la restauration des services perturbés ou à l'indemnisation des dommages occasionnés par un incident. Pour accompagner la montée des risques et en capitalisant sur l'expérience déjà acquise avec ces premiers contrats, il est maintenant temps de passer à un niveau supérieur.

Les clients d'AIG peuvent ainsi bénéficier d'un audit de leurs infrastructures. Après analyse des systèmes face à un ensemble de scénarios d'attaque connus, ils reçoivent un rapport détaillé leur procurant une vue précise de l'état de leurs défenses et esquissant des recommandations afin de renforcer leurs protections. L'objectif initial du service est de renforcer la sensibilisation des entreprises aux risques qu'elles encourent. Mais il en est un autre, qui prendra rapidement de l'importance : la compagnie pourra ajuster ses conditions d'assurance selon la situation telle qu'elle est évaluée sur le terrain.

Certains observateurs relèvent que les tests de sécurité réalisés sont rudimentaires et ne seraient, en conséquence, pas suffisants pour être réellement efficaces. C'est oublier que, dans la plupart des entreprises, les précautions minimales ne sont pas mises en œuvre, faute d'expertise. La solution proposée par AIG a ainsi, d'abord, un rôle pédagogique, qui se double d'une première couche de conseils simples dont la valeur peut s'avérer inestimable. De surcroît, il ne fait nul doute que l'assureur pourra progressivement envisager de raffiner son approche, au fil de son appropriation par les clients.

En combinant d'emblée des objectifs de prévention et d'ajustement de la couverture par une analyse (plus ou moins automatisée) de l'exposition de l'entreprise en matière de cybersécurité, la démarche d'AIG représente en quelque sorte un modèle pour l'assurance de demain. En effet, avec la prolifération de sources de données, la mesure effective des risques (bientôt en temps réel) et la capacité à personnaliser les conditions de protection vont progressivement pouvoir se généraliser dans tous les domaines.

AIG – Protect Your Business From Cyber Risks

jeudi 21 décembre 2017

NatWest aide les entrepreneurs à pitcher

NatWest Pitch
Tous les entrepreneurs le savent, l'art du « pitch » est essentiel pour exploiter au mieux les opportunités qui surgissent dans la vie de leur startup. En guise de cadeau original de fin d'année, NatWest met à contribution son expérience en la matière en publiant une application mobile (gratuite) de création assistée de la présentation idéale.

L'idée peut paraître saugrenue, surtout émanant d'une banque, mais, après tout, la filiale de RBS croise le destin de milliers de petites entreprises, clientes naissantes ou qui cherchent à développer un nouveau concept, sans compter toutes celles qui viennent lui proposer d'acquérir leurs produits. Elle est de la sorte régulièrement exposée aux « pitchs » de fondateurs sollicitant un financement, désirant lancer une expérimentation… Or, étonnamment, il existe à ce jour peu de solutions prêtes à l'emploi permettant de s'entraîner et de parfaire son discours dans ce genre de circonstances.

L'application répond simplement à ce besoin. Elle facilite d'abord l'organisation de la structure de la présentation, afin de la rendre la plus complète, la plus captivante et la plus percutante possible, en garantissant à l'utilisateur de n'oublier aucun élément important. Elle accompagne ensuite l'enregistrement vidéo des séquences successives et leur assemblage final. Enfin, elle incite l'entrepreneur à partager son « pitch » auprès de ses contacts, sur les réseaux sociaux… ou sur la page Facebook dédiée de NatWest.

NatWest Pitch

Aussi modeste soit-elle, l'initiative de la banque apporte un vrai bénéfice à tous les acteurs de l'entrepreneuriat. Pour les porteurs de projet, elle les aidera à élaborer leur discours, alors qu'ils n'ont aujourd'hui à leur disposition que quelques livres, sites web de recettes pratiques et leurs propres essais en conditions réelles, au cours desquels ils apprennent progressivement les ficelles d'une bonne présentation, s'ils ont la chance de tomber sur un interlocuteur qui accepte de prendre le temps de les conseiller.

Pour NatWest, outre l'impact sur son image parmi les entreprises, il existe certainement aussi une volonté de faciliter ses relations avec les créateurs et les dirigeants. En effet, il est toujours un peu désespérant de voir des projets échouer à convaincre (voire échouer tout court) uniquement parce que leur présentation est trop brouillonne, insuffisamment claire, trop longue, déséquilibrée… Les autres parties prenantes (investisseurs, notamment) apprécieront également de recevoir des « pitchs » plus pertinents.

Accompagner ses clients quand on est une banque peut parfois faire appel à des compétences autres que financières : étant fréquemment confrontée à l'exercice d'évaluation de nouvelles activités, elle a forcément une expertise à partager dans ce registre et il faut peu de choses pour en faire profiter les entrepreneurs…

mercredi 20 décembre 2017

Anorak, le conseil en assurance automatisé

Anorak
Choisir une assurance pour une voiture ou une résidence est relativement simple et les comparateurs sont là pour nous aider à trouver le meilleur prix. Il est cependant des produits plus complexes, tels que les couvertures en cas de décès, pour lesquelles le recours à un conseil humain restait indispensable. Jusqu'à maintenant.

Au Royaume-Uni, par exemple, le constat est sans appel : bien qu'ils aient souvent un rôle essentiel dans leur famille, pour garantir un revenu, rembourser un crédit hypothécaire…, 8,5 millions de britanniques ne disposent d'aucune protection en cas de disparition, justement parce que les solutions disponibles leur paraissent difficiles à comprendre et à différencier et que les « vendeurs » habituels semblent plus enclins à déclamer leur jargon qu'à prendre en compte les besoins réels de leurs interlocuteurs.

C'est pour ces personnes qu'Anorak a conçu une plate-forme de conseil entièrement automatisé. Il suffit au demandeur de décrire sa situation (personnelle, familiale, financière…) au fil d'un questionnaire simple pour obtenir une recommandation personnalisée d'assurance, précisément adaptée aux risques qu'il encourt et à son train de vie. Enfin, la startup propose de rechercher et de souscrire le contrat le plus proche du produit idéal auprès des différentes compagnies avec qui elle est en relation.

Par la suite, contrairement aux comparateurs classiques qu'on ne consulte qu'une fois et qu'on oublie immédiatement, le service pourrait continuer à surveiller l'évolution du contexte de l'assuré et détecter la survenue de nouvelles circonstances susceptibles d'influer sur sa couverture, afin de pouvoir ajuster à tout moment les recommandations émises et optimiser les contrats souscrits. Le robot-conseiller deviendrait ainsi un compagnon permanent, toujours prêt à alerter d'un changement à prendre en compte.

Le fonctionnement d'Anorak repose naturellement sur une analyse de données, aussi bien dans son approche de la connaissance des clients et de la découverte de leurs besoins que dans le décryptage des clauses des polices d'assurance qu'elle leur conseille. Elle s'appuie pour ce faire sur une variété de sources, disponibles publiquement ou acquises via des partenariats, qui enrichissent les informations fournies par les consommateurs. Il est notamment envisagé d'accéder à des données de comptes bancaires pour mieux appréhender le comportement financier des demandeurs.

Aux inconditionnels du conseil humain (dans tous les domaines de la finance), les concepteurs d'Anorak opposent une vision pragmatique. Aujourd'hui, les professionnels qui sont là pour guider leurs clients dans la jungle de produits existants se rangent dans deux catégories : d'une part, ceux qui n'ont ni la formation ni le temps pour maîtriser le catalogue à leur disposition et connaître leurs clients et, d'autre part, ceux qui possèdent une véritable expertise mais réservent celle-ci à une clientèle aisée.

Sans nécessairement promettre le même niveau de service aux premiers qu'aux deuxièmes, les technologies actuelles et émergentes, telles que l'intelligence artificielle, permettent certainement – ou permettront bientôt – d'offrir une qualité de conseil automatique largement supérieure à celle des agents humains « moyens » auxquels ont accès l'immense majorité des consommateurs. L'ambition d'Anorak est de prendre cette place pour l'assurance décès (ou l'assurance vie, au sens anglo-saxon).

We're Anorak

mardi 19 décembre 2017

Un café culturel pour une banque mobile ?

imaginBank
La nouvelle initiative de CaixaBank me laisse désespérément perplexe : l'ouverture d'un espace culturel de 1 200 m2 au cœur de Barcelone, en guise d'accompagnement de sa banque 100% mobile, lancée au début de 2016. Les réflexions autour de l'évolution des réseaux d'agences prennent décidément des directions pour le moins surprenantes…

Le lieu n'a en effet plus rien à voir avec son origine, hormis son nom, « imaginCafé » (en écho à « imaginBank »). Sur trois étages, il propose aux jeunes – qui constituent la cible privilégiée de la banque – des espaces de détente, pour prendre un café ou se restaurer, parcourir l'exposition du moment, assister à la projection d'un film, découvrir les dernières créations d'un jeune couturier…, et quelques zones de travail, mises à leur disposition gratuitement, sur simple réservation. Clients et non clients sont bienvenus, les premiers bénéficiant cependant d'animations et autres privilèges particuliers.

Ouvert 7 jours sur 7, sur des horaires étendus (de 8 heures à 20 heures, voire minuit en fin de semaine), le dispositif « physique » est en outre complété d'un miroir virtuel, sur le web et sur les réseaux sociaux, afin de permettre aux clients éloignés de Barcelone de participer aussi aux événements. La vision de ses concepteurs est de faire de l'« imaginCafé » un nœud d'attractivité de la jeunesse en matière de culture, de créativité, d'innovation… notamment à travers des rencontres et de la spontanéité.

Mais quel est donc l'objectif pour la banque ? Selon ses dires, il s'agit d'offrir un point de contact à ses 500 000 clients (et, vraisemblablement, ses prospects). Plus précisément, CaixaBank estime que les attentes et les intérêts des jeunes d'aujourd'hui imposent d'inventer une manière différente de communiquer avec eux, faite de divertissement, de plaisir, de partage, de création… Ces ingrédients, matérialisés dans l'« imaginCafé » représenteraient les bases de la relation future entre consommateurs et marques.

Alors que l'idée se diffuse progressivement que les agences bancaires sont des composantes importantes d'une stratégie de communication, en disséminant une présence visible et susceptible d'inspirer confiance, CaixaBank pousse le raisonnement à l'extrême, en faisant disparaître entièrement son métier du lieu, qui ne devient ainsi qu'un emblème marketing. La démarche est audacieuse et on sera curieux de son devenir, d'autant que les résultats concrets seront certainement difficiles à mesurer.

Bien que leur format fût assez différent, puisqu'ils intégraient une dimension d'assistance et de conseil, l'« imaginCafé » ne peut manquer de rappeler les anciens ING Cafés français, aujourd'hui fermés, faute de fréquentation et de justification, déjà, de leur rôle de relais de confiance. Et, de fait, s'il est compréhensible qu'un établissement traditionnel tienne à afficher sa présence rassurante au plus près de ses clients (peut-être plus, d'ailleurs, pour éviter l'inquiétude en cas de disparition), pourquoi une banque mobile devrait-elle se plier à l'injonction ? N'est-ce pas plutôt un signe d'ambiguïté ?

ImaginCafé Barcelone

lundi 18 décembre 2017

Les assureurs engagent la guerre des données

#Data4Drivers
Il est des métiers dans lesquels les données sont la matière première indispensable de l'activité. L'assurance est un de ceux-là et, tandis que les gisements de cette précieuse ressource se multiplient et leurs offrent toujours plus d'opportunités, ses acteurs découvrent avec anxiété que leur approvisionnement dépend de fournisseurs tiers.

Une pétition lancée la semaine passée par la fédération professionnelle Insurance Europe constitue un des premiers signes de cette prise de conscience. En interpellant les consommateurs afin qu'ils exigent une réglementation claire de l'Union Européenne confirmant leur pleine propriété des données générées et collectées par leur voiture, la campagne #Data4Drivers expose clairement, bien qu'indirectement, l'inquiétude qui pèse chez les assureurs face à l'évolution des technologies automobiles.

Leur préoccupation ne peut surprendre. Déjà aujourd'hui, les programmes de type « pay how you drive », ajustant les termes des contrats selon le comportement du conducteur au volant, requièrent un accès aux informations captées par le véhicule. Qu'en sera-t-il demain, quand les systèmes de pilotage automatique auront pris le dessus, chaque heure de trajet produisant 4 téraoctets de données, qui pourront être utilisées pour gérer la prévention, déterminer les conditions et responsabilités d'un incident…?

Pour les constructeurs, l'intérêt de nouveaux partenaires potentiels pour la masse de données que produisent leurs automobiles est une aubaine, qui n'a pas tardé à susciter l'émergence d'activités dédiées. Ainsi, outre l'utilisation logique par Tesla des flux recueillis sur les voitures de ses clients pour, par exemple, améliorer ses capacités d'automatisation, une startup comme l'israélienne Otonomo bâtit une place de marché sur laquelle les informations amassées peuvent être commercialisées.

En réponse à ce mouvement, les assureurs peuvent légitimement – même si leur démarche comporte une part de manipulation – invoquer les règles sur les données personnelles (bientôt incarnées par le RGPD) afin de sécuriser leur accès à une partie de la matière première désormais nécessaire pour exercer leur métier. Cependant, ils doivent aussi comprendre que leur perte de contrôle est inéluctable : leur appétit en octets n'ira que croissant et il faudra négocier leur acquisition auprès de leurs producteurs.

Le secteur automobile n'est évidemment pas le seul concerné par ces changements et le même dilemme devra être résolu dans tous les domaines. Il ne faudra alors jamais perdre de vue que, à l'avenir, l'avantage concurrentiel principal pour développer un produit d'assurance risque de ne plus être l'expertise métier mais l'accès aux « bonnes » données. Et ceux qui en sont les plus proches (dont les fabricants de voitures) pourraient aussi profiter de cette réalité pour s'infiltrer sur le marché (comme l'esquisse Tesla)…

Données automobiles

dimanche 17 décembre 2017

Flagrant délit de blockchain inutile !

Vanguard
Il y a quelques jours, le géant américain de l'investissement Vanguard annonçait qu'il lançait sa propre blockchain, destinée à mieux partager les indices de marchés avec ses clients. L'initiative, comparable à celle de beaucoup d'autres institutions financières, mérite de s'y arrêter, car sa présentation même expose son invraisemblable futilité.

En résumé, le projet, conçu et développé en partenariat avec le Center for Research in Security Prices (CRSP), producteur de données financières, et Symbiont, fournisseur de la technologie retenue, consiste à utiliser la base de données distribuée qu'est une blockchain pour mettre à la disposition des gestionnaires de fonds et autres participants aux marchés les informations dont ils ont besoin dans leur travail quotidien. L'objectif est de rendre cette transmission plus rapide, plus sécurisée et plus fiable.

Il est vrai que les modes de fonctionnement existants révèlent un besoin criant de modernisation. En effet, à ce jour, les gérants de Vanguard exploitent les données brutes fournies par le CRSP pour produire leurs résultats, sous forme de fichiers qu'ils envoient à intervalles réguliers à leurs clients, via différents canaux et intermédiaires, pour intégration, souvent manuelle, dans leurs propres systèmes. Tout l'enjeu de la démarche entreprise est donc d'automatiser ces processus, lents et sujets à erreurs.

Faisons ici une pause et résumons encore la situation : il ne s'agit que de déployer une nouvelle solution pour optimiser un traitement d'information aujourd'hui inefficace ? Mais pourquoi diable faudrait-il une blockchain pour ce faire ? N'y a-t-il donc pas d'autre possibilité, plus simple et moins coûteuse à mettre en œuvre ? En quoi une base de données classique (peut-être répliquée, s'il faut réellement en garantir la disponibilité) et quelques applications complémentaires ne suffisent-elles pas à la tâche ?

Vanguard se garde bien de répondre à ces questions… Car la vérité est qu'il n'existe aucune justification rationnelle à son usage de la blockchain, hormis une envie de surfer sur la mode du moment. La décentralisation ? Un simple accès distribué aux données suffit. L'autorité de confiance ? Vanguard continue à l'assumer, de fait. La résilience ? Si elle est vraiment critique, il ne faut pas oublier que les fournisseurs de données (brutes et retraitées) restent un point de faiblesse majeur.

À l'inverse, les arguments contre la blockchain valent d'être pris en considération. Sans revenir sur les coûts de mise en œuvre et de fonctionnement ou la rareté des compétences requises, j'aimerais aborder un autre thème… Alors que les banques vantent leur engagement en faveur de l'environnement et que le monde s'effraie de la consommation électrique due au bitcoin, pourquoi le déploiement d'une multitude de nœuds de blockchain pour une application triviale n'est-il pas autant décrié ?

Si je m'acharne ici sur l'initiative de Vanguard, il me faut préciser que la plupart des expérimentations et autres implémentations de blockchain en entreprise manquent tout autant de légitimité. Telles sont les conséquences de la mode : il ne semble plus nécessaire de valider les conditions ou les équilibres économiques d'un projet pourvu qu'il adopte les technologies en vogue. Le retour de bâton risque d'être douloureux…

Dans le cadre de quelques interventions auprès de grandes institutions financières, j'ai développé une approche méthodologique structurée (légère) destinée à évaluer l'opportunité objective d'utilisation d'une blockchain sur un cas d'usage donné. N'hésitez pas à me contacter pour plus d'informations.

Vanguard – Built for the long term

samedi 16 décembre 2017

Citi lance sa communauté de testeurs

Citi
Combien en a-t-on déjà vu passer, de ces tentatives par des banques d'instaurer une communauté de clients autour de tests en avant-première d'applications innovantes ou de fonctions inédites ? Après BNP Paribas (avec 2 essais), BBVA, Société Générale, Barclays…, voilà maintenant le tour de Citi, qui lance sa plate-forme Canvas.

Dans une époque qui exige toujours plus de réactivité et d'agilité de la part des entreprises, en particulier dans le secteur financier, les démarches de ce genre sont plutôt bienvenues. Le principe est en effet de créer de nouvelles solutions, de les soumettre à des utilisateurs (réels) le plus rapidement possible et de recueillir leurs avis et commentaires, de manière à converger en quelques itérations vers un résultat répondant à un besoin confirmé (ou à abandonner les idées qui ne rencontrent pas leur public).

Malheureusement, les exemples passés démontrent qu'il est extrêmement difficile de faire vivre et prospérer ces initiatives. Hormis le portail « beta testers » de BBVA (qui, en 2 ans et demi, a enregistré près de 20 000 réponses, de ses quelques 10 000 membres inscrits, aux 292 campagnes proposées), tous ceux que je citais en introduction sont abandonnés ou (plus ou moins) en déshérence après quelques mois ou, au mieux, quelques années. Or le projet de Citi ne paraît pas se démarquer de ces précédents.

Ainsi, le modèle de Canvas ne réserve pas de surprises. Les clients de la banque sont invités à s'inscrire pour obtenir une chance (s'ils sont qualifiés) de participer à des expérimentations sur différents thèmes. Outre la découverte en primeur de nouveaux concepts (qui peut attirer les curieux et les « geeks »), les organisateurs leurs promettent d'écouter leurs opinions et leurs suggestions pour ajuster les produits issus de ces tests au mieux de leurs attentes (collectives). Une vraie approche de co-innovation…

Pour le démarrage, deux projets sont présentés. Le premier est une solution originale de classification des dépenses – réparties entre besoins, envies et objectifs – destinée à mieux faire prendre conscience aux consommateurs de leurs petits travers dans la gestion de budget. Le deuxième vise à déterminer s'il existe une corrélation entre le nombre de pas marchés dans la journée et le comportement d'achat. Enfin, un troisième est annoncé, qui consistera à offrir une ligne de crédit aux travailleurs indépendants.

Canvas, designed by Citi

Citi a-t-elle une chance d'assembler une communauté sérieuse sur cette base ? J'en doute. Tout d'abord, les applications proposées, aussi intrigantes soient-elles pour des spécialistes de la gestion de finances personnelles, risquent de n'attirer que peu d'intérêt de la part du grand public, ne serait-ce que par la difficulté à en percevoir la valeur a priori. D'autre part, elles me semblent être beaucoup trop spécialisées pour susciter une conversation constructive avec leurs utilisateurs, sauf énorme effort d'animation.

Objectivement, ces solutions ne méritent probablement pas une phase de tests privés : elles auraient tout aussi bien pu (et dû) être directement mises à disposition de tous les clients (plutôt sous forme d'options dans les applications bancaires existantes), quitte à devoir collecter des avis exprimés de manière plus informelle (sur les réseaux sociaux, dans les AppStores…). L'autre hypothèse, d'un attrait pour le privilège de participer à un club fermé, n'est pas non plus très convaincante, dans le cas d'une banque.

Surtout, le véritable défi pour Canvas sera de maintenir une dynamique dans la durée. C'est l'obstacle sur lequel achoppent les initiatives similaires et c'est celui que BBVA a peut-être su déverrouiller, en ouvrant largement la création de campagnes à ses collaborateurs. Car, quand les consommateurs sont sollicités de toute part, par les réseaux sociaux ou par des milliers d'applications sur leur smartphone, il n'est d'autre choix que de renouveler les sujets continuellement pour espérer capter leur attention…

vendredi 15 décembre 2017

Quels services pour les assistants vocaux ?

Ally Bank
Et une de plus ! Ally Bank a récemment rejoint le petit groupe de banques (américaines, essentiellement) proposant à leurs clients une « skill » Alexa, qui leur permet d'interagir avec leurs finances personnelles par l'intermédiaire des assistants vocaux Echo d'Amazon. Mais les scénarios d'usage manquent toujours d'imagination…

L'initiative ne surprend pas de la part d'Ally Bank, puisque, depuis plus de deux ans, elle a déjà intégré dans son application mobile une capacité de dialogue, par messages écrits ou par la parole, permettant d'accéder facilement à la plupart des opérations disponibles à distance. En comparaison, le service déployé pour Alexa est embryonnaire, n'autorisant (quasiment) que la consultation des comptes (soldes et transactions récentes) et les virements (sécurisés) depuis et vers les comptes pré-enregistrés.

Il existe bien une fonction supplémentaire, plus originale : « CurrenSee » convertit un prix énoncé en dollars en son équivalent en temps de travail (moyennant la fourniture préalable – et systématique ! – du salaire annuel et des horaires habituels). L'idée est amusante mais elle ne changera pas la face du monde. Alors, quand la banque affirme qu'elle ajoutera d'autres options au fil du temps, on peut tout de même s'interroger sur sa capacité à inventer des usages différenciateurs pour les assistants vocaux.

Alexa, Open Ally.

Au-delà du seul cas d'Ally Bank, le reproche vaut pour la majorité des autres institutions financières engagées dans des démarches similaires. Si le consommateur peut apprécier de disposer d'un moyen interactif, toujours à l'écoute, d'exécuter des tâches simples, l'avantage reste modeste par rapport aux possibilités offertes par les applications mobiles actuelles. Pour les pionniers qui croient vraiment à l'avenir de ces nouvelles interfaces, il serait donc temps d'explorer les opportunités uniques qu'elles inspirent.

Parmi les plus ambitieuses d'entre elles, je retiendrais plus particulièrement celles qui mixeraient analyse prédictive et conseil personnalisé. Je rêve ainsi d'un assistant avec lequel je discuterais de mon projet (de voyage, de changement de résidence…), en décrivant et en ajustant mes hypothèses, auxquelles il répondrait par des suggestions diverses et des recommandations concrètes… Voilà un exemple (qu'il est aussi possible de simplifier !) dans lequel une interface vocale prendrait toute sa valeur.

En attendant la réalisation de cette vision, les projets actuels se focalisent d'abord sur une autre manière, peut-être plus directe et plus rapide, de naviguer dans les opérations courantes. Cela permet aux équipes de la banque de se familiariser avec la technologie et son potentiel. Mais, comme d'habitude, il faudra rapidement dépasser ce stade pour espérer conserver la fidélité des clients sur Alexa – et ses cousin(e)s – et éviter de les voir se tourner vers des acteurs mieux armés pour ce nouveau genre de relation.

jeudi 14 décembre 2017

Bientôt une banque pour chaque circonstance

Thomas Cook
Entre l'émergence de la FinTech et la crainte d'une irruption des géants du web sur le marché, un autre scénario de rupture se dessine pour les banques : il suffirait de prolonger le concept des services financiers immergés dans les moments de vie du consommateur pour imaginer le développement d'offres dédiées par une nouvelle classe d'acteurs.

Dans un sens et sous une forme encore limitée, l'hypothèse est déjà d'actualité avec les initiatives des grands acteurs de la distribution, de Tesco Bank au compte C-Zam de Carrefour, par exemple. Il est vrai que dans ces cas précis, le principe du moment de vie tend à posséder un attrait limité. Tout le contraire des vacances, qui représentent une occasion très particulière (et propice aux changements), et sur lesquelles le spécialiste Thomas Cook veut justement positionner sa nouvelle solution [PDF], baptisée Sumo.

Pour concevoir une proposition de valeur qui s'inscrive dans son ADN et trouve un écho auprès de ses clients, le voyagiste à fait appel au Groupe Ferratum et son approche de « banque as a service ». Sur cette base, les deux partenaires ont créé une plate-forme proposant un compte bancaire multi-devises (assorti d'une éventuelle autorisation de découvert), une carte de débit et une option de transferts de personne à personne par SMS pour gérer les petites urgences entre amis ou dans la famille.

Avec des conditions présentés comme avantageuses (notamment sur le change), Thomas Cook peut ainsi accompagner les finances de ses clients pendant leurs voyages. Cependant, les projets de vacances ne se réduisent pas à l'intervalle entre le départ et le retour : la préparation aussi est importante. C'est la raison pour laquelle Sumo intègre en outre une gamme de produits d'épargne et un outil d'aide à la gestion de budget (quoique sa description n'augure guère de capacités très évoluées en la matière).

Sumo

En résumé, Sumo peut se vanter d'être l'instrument financier idéal du vacancier. Assisté par une application unique, il lui propose en effet de mettre de côté, tout au long de l'année, l'argent nécessaire pour réaliser ses projets, de parcourir le catalogue de Thomas Cook, de procéder à ses réservations, puis de gérer ses dépenses en toute confiance durant son séjour, avec le matelas de sécurité du découvert, en cas de besoin.

À ce stade, la démarche demeure timide et paraît inaboutie. Il serait notamment facile d'envisager des synergies plus fortes entre le métier d'origine de Thomas Cook et ses services financiers, permettant de faire de ces derniers une évidence pour les voyageurs. Toujours est-il qu'elle esquisse un intéressant renversement de perspective par rapport aux habitudes, en substituant le « fournisseur d'expérience » à la banque comme l'intermédiaire privilégié des questions d'argent dans une relation déterminée.

Une telle approche pourrait-elle être généralisée, jusqu'à devenir un modèle dominant ? Après tout, la génération montante des offreurs de « banque as a service » est prête à répondre à l'opportunité. Il faudrait cependant que soient d'abord éliminées les frictions qu'introduirait inévitablement la multiplication des comptes spécialisés. Ce n'est pas impossible, si des acteurs (les mêmes ?) décident de s'emparer du sujet. Enfin, les consommateurs devront confirmer (ou non) leur appétence pour cette révolution…

mercredi 13 décembre 2017

Mastercard avance dans sa diversification

Mastercard
Probablement en raison d'une certaine pression sur leurs marges, il semblerait que tous les acteurs des paiements cherchent à diversifier leurs activités. D'abord observé parmi les nouveaux entrants, le phénomène atteint maintenant aussi les établissements traditionnels, comme Mastercard avec le lancement annoncé d'« Assemble ».

Comme tant d'autres entreprises du secteur, l'ambition de Mastercard est ici de s'appuyer sur sa présence au cœur des dépenses des consommateurs pour devenir leur compagnon privilégié en matière de gestion (extensive) des finances personnelles. Et, à l'instar de la plupart des initiatives du même ordre, ses projets visent en priorité la cible des jeunes adultes, considérée comme la plus susceptible de répondre à une proposition « digitale » de simplification de leur vie quotidienne en matière d'argent.

Les recettes adoptées reposent sur des fondations relativement classiques, combinant suivi des comptes, gestion de budget, pilotage de l'épargne par projets et transferts de personne à personne. À cette base, Mastercard compte progressivement ajouter d'autres services. Le premier d'entre eux sera un compte prépayé, géré par la même application mobile, associé à une carte de paiement (physique ou virtuelle), conçue comme un support polyvalent pour de futurs usages (dont ceux de l'économie collaborative).

En raison de son positionnement « B2B », l'offre Mastercard Assemble sera commercialisée auprès des partenaires de l'entreprise (dont les banques émettrices de ses cartes), qui pourront l'implémenter, au choix, comme une solution complète (sur web et smartphone), mise à disposition en marque blanche, ou, via un jeu d'API, sous forme de services complémentaires à intégrer dans leurs propres applications.

Dans les deux cas, l'argument de la rapidité et de la simplicité de déploiement touchera en priorité les « petits » clients de Mastercard qui n'ont pas toujours les ressources requises pour développer des applications sophistiquées. Elle sera donc particulièrement convaincante pour la multitude de « credit unions » et autres institutions locales existant aux États-Unis (qui sera le premier marché sur lequel le produit sera distribué, avant une extension à partir de 2018). Les grandes banques risquent, en revanche, de peu apprécier la concurrence que leur oppose ainsi un de leurs fournisseurs.

Pourtant, le mouvement enclenché par Mastercard paraît inéluctable. D'un côté, les menaces s'accumulent sur ses modèles historiques, entre émergence de solutions alternatives et contraintes réglementaires. De l'autre, son métier lui donne accès à une mine d'informations sur les utilisateurs de ses moyens de paiement, qui lui offre des opportunités incomparables de création de nouveaux services. Or ceux-ci seront en position de phagocyter – ou, à tout le moins, gêner – les initiatives comparables des banques, qui ne disposent des mêmes données qu'en deuxième rang.

Mastercard

mardi 12 décembre 2017

L'expérience client compte. Vraiment.

Relay42
Une multitude d'études ont été publiées confirmant toutes, à des degrés divers, que les consommateurs restent en majorité attachés à leur relation avec les banques traditionnelles. Alors, quand il en arrive une nouvelle, en provenance du Royaume-Uni, qui semble prendre ces résultats à contrepied, il vaut certainement de s'y arrêter un instant…

Soyons réalistes, l'enquête menée auprès de quelques 2 000 personnes ne va pas sérieusement remettre en cause les certitudes sur le sujet. Il faut en effet relativiser son résultat principal, selon lequel 27% des sondés possèdent un compte dans un établissement 100% en ligne ou mobile, auxquels s'ajouteraient 26% qui envisagent de les rejoindre : pour beaucoup d'entre eux, il s'agit probablement d'un compte d'appoint, qui n'altère pas fondamentalement leur relation avec leur banque principale.

Malgré tout, ce niveau d'infidélité, même partielle, paraît particulièrement élevé et suscite donc la curiosité. Une première justification possible est peut-être à rechercher dans le foisonnement d'offres alternatives que connaît aujourd'hui le marché britannique, notamment de la part de startups de la FinTech. Ces nouveaux entrants n'hésitent pas, en outre, à communiquer largement, en cherchant à se démarquer d'un secteur bancaire qui, dans ce pays, porte encore les stigmates visibles de la crise de 2008.

Il est toutefois plus intéressant et plus instructif de se pencher sur une autre question du sondage, celle de la motivation des consommateurs favorables à une migration. Si, sans grande surprise, 29% d'entre eux citent les coûts plus attractifs comme un facteur décisif, la meilleure qualité de service obtient presque autant de suffrages (28%)… tandis que l'excellence de l'expérience client et des fonctionnalités disponibles en ligne en recueille le double ! Voilà qui pourrait remettre en cause quelques préjugés…

Car, alors qu'elle ne devrait pas étonner, la réponse positive des utilisateurs aux promesses (tenues) des nouveaux acteurs représente un désaveu magistral aux banques historiques dont la seule stratégie consiste à déployer des approches « low-cost » sur mobile, sans prendre le soin de revisiter leurs processus. En se contenant de déguiser les services qu'ils connaissent déjà et qui ne sont plus à la hauteur de leurs attentes ni de la concurrence actuelle, elles ne duperont plus leurs clients longtemps.

La diversité et le dynamisme de l'offre présente en Angleterre constitue évidemment un facteur essentiel de la maturité du grand public vis-à-vis de leurs institutions financières et de la possibilité d'imaginer une autre vision des services bancaires. Or, si les populations des autres pays européens (dont la France) sont encore loin de cette prise de conscience, il ne faut pas s'y tromper : leurs mentalités et leurs comportements évolueront aussi. L'attention à l'expérience client est donc plus critique que jamais !

Évolution de la banque

lundi 11 décembre 2017

La « banque as a service » prend du galon

solarisBank
Depuis son lancement en 2016, la jeune pousse allemande solarisBank a réussi à conquérir quelques petits acteurs de la FinTech avec son concept de « banque as a service ». Elle peut désormais aussi se vanter d'avoir séduit un établissement de premier ordre, la néerlandaise ABN Amro, par l'intermédiaire de sa filiale 100% en ligne.

D'un côté, nous avons donc Moneyou, lancée en Allemagne en 2011 (la création de la marque aux Pays-Bas remontant à 2001) afin d'installer une présence d'ABN Amro auprès du grand public. Elle y commercialise une petite sélection de produits simples d'épargne et d'investissement, pour laquelle elle a retenu un modèle entièrement à distance et totalement dématérialisé. Souhaitant profiter d'une forte croissance du crédit en ligne en Allemagne, elle vient d'ajouter le prêt à la consommation à son catalogue.

De l'autre côté, solarisBank, armée de sa propre licence bancaire, fournit une gamme étendue de produits aux acteurs qui, comme ABN Amro, désirent étendre leur offre. Mise à disposition sous la forme d'une API extrêmement simple à intégrer, sa solution permet ainsi de proposer aux clients de Moneyou d'emprunter entre 1 000 et 35 000 euros, à travers une procédure rapide (moins de 7 minutes !), comprenant transmission de justificatifs et signature électroniques, validation de l'éligibilité par une analyse automatisée des relevés d'opérations bancaires et authentification vidéo.

Moneyou & solarisBank

Même si elle intervient dans le contexte très particulier d'une filiale spécialisée, cette intégration d'un service tiers – émanant d'un nouvel entrant, qui plus est ! – dans le périmètre d'une banque plus traditionnelle représente bien un changement notable d'attitude dans le secteur. En rêvant un peu, il pourrait signaler un début de prise de conscience de la transformation inéluctable des modèles monolithiques classiques en une approche de « plate-forme », dans laquelle une immense variété de produits sont disponibles pour répondre le plus précisément possible aux besoins des clients.

Cette tendance constitue également le catalyseur d'un changement profond du positionnement des institutions financières : les anciens discours (stériles jusqu'à maintenant) sur la séparation entre production et distribution prennent soudain un nouveau relief, quand, simultanément, émergent des acteurs qui, à l'instar de solarisBank, cherchent à industrialiser la fourniture de solutions clés en main, faciles à utiliser, en face de marques qui, comme Moneyou, visent à s'imposer sur la qualité de la relation client et sont prêtes, pour ce faire, à agréger des offres issues de différents partenaires.