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C'est pas mon idée !

mercredi 30 novembre 2016

Fintech Village ING, deuxième saison

ING
Un an après sa promotion inaugurale, le FinTech Village d'ING revient ces jours-ci pour une deuxième saison. Quelques évolutions marquent ce retour, dont la principale est l'accent mis sur la collaboration avec les startups accueillies, autour d'un certain nombre de challenges spécifiques qui constituent les priorités du moment dans la banque.

Commençons par rappeler ce qui ne change pas dans le programme concocté par ING avec ses deux partenaires, Deloitte et Swift Innotribe : le lieu d'hébergement, à Bruxelles, la durée limitée (classiquement) à 16 semaines, le dispositif d'accompagnement, avec, toujours, son impressionnant aréopage de mentors, dont la plupart sont désormais issus de la banque (en dehors des deux entreprises associées à l'initiative, les intervenants extérieurs qui contribuaient à la précédente édition semblent avoir disparu ?).

En revanche, c'est bien une orientation différente que prend donc le FinTech Village, puisque sa cible est maintenant d'introduire les solutions des jeunes pousses au sein des métiers d'ING. Et les moyens mis en œuvre sont à la mesure de cette ambition : chacune des 7 à 10 candidates retenues bénéficiera du parrainage d'un responsable haut placé dans le groupe, dont le rôle sera d'assurer la mise à disposition des moyens (humains) nécessaires au développement d'un « proof of concept » pertinent pour lui.

ING FinTech Village

Les thèmes privilégiés par les futurs sponsors de l'accélérateur ne surprendront pas outre mesure, même s'il faut souligner qu'ils témoignent d'une vision plutôt avancée des tendances les plus importantes pour les années à venir, entre l'ultra-personnalisation des services offerts à la clientèle, la sécurisation de la banque sans impact sur l'expérience utilisateur, les gains d'efficacité dans les méthodes de travail des collaborateurs et les idées « révolutionnaires » susceptibles de renverser les modèles existants.

Le FinTech Village nouveau sera donc résolument mis au service de l'innovation dans ING, de préférence sous un mode de diffusion large dans l'organisation, porté par le haut de la hiérarchie. Le principe rappellera immanquablement l'approche adoptée par L'Atelier BNP Paribas avec son propre accélérateur, dont les résultats paraissent plutôt positifs (un de ses derniers avatars en date étant une prise de participation dans PayCar, une startup ayant bénéficié du programme). Les stratégies de collaboration des institutions financières avec l'univers de la FinTech sont clairement en train de se raffiner…

mardi 29 novembre 2016

Face aux robo-advisors, Barclays joue son atout

Barclays
Conquises par le principe du conseil en investissement automatisé des robo-advisors, plusieurs institutions financières cherchent à en répliquer le modèle, soit par elles-mêmes, soit à travers des partenariats. Barclays est une des premières à esquisser une voie originale, en explorant d'abord les moyens de capitaliser sur ses forces historiques.

Certes, l'annonce de la britannique peut laisser le lecteur sur sa faim : il n'est même pas question de gestion assistée, puisque son nouveau service se contente d'offrir aux clients un accès à ses outils existants d'investissement individuel au cœur de sa plate-forme de banque en ligne. La seule concession faite à l'émergence des trublions de la FinTech est une tarification relativement modérée et qualifiée de transparente (mais qui reste encore bien loin d'atteindre les « standards » qu'imposent les startups en la matière…).

Alors, il faudra de l'imagination pour se projeter au-delà de ce que le directeur de l'investissement et du patrimoine de Barclays présente comme une « première étape », en évoquant l'évolution nécessaire du conseil financier, au Royaume-Uni, face à une population souvent peu au fait des opportunités de l'épargne sur les marchés. Et il ne faut pas chercher très longtemps pour comprendre que l'intégration d'une plate-forme d'investissement dans la gestion de comptes recèle un potentiel inexploité…

Rêvons (?), par exemple, à une solution qui, à partir d'une analyse des transactions courantes de la famille et des projets d'avenir qu'elle a enregistrés dans un module de planification budgétaire, se verrait automatiquement proposer, avec une approche pédagogique claire, une stratégie d'investissement adaptée, capable de l'aider à atteindre ses objectifs à court et long terme, dans le respect de son profil d'appétence aux risques (déterminé, lui aussi, par les habitudes déduites de son activité quotidienne).

Naturellement, contrairement à nos voisins d'outre-Manche, nos banques hexagonales incluent déjà l'accès à la bourse dans leurs services en ligne. Il est toutefois difficile de parler d'intégration, tant la gestion de portefeuille est généralement isolée des comptes courants et d'épargne. Un rapprochement « intelligent » entre ces deux mondes apporterait pourtant une valeur ajoutée importante aux clients, tout en constituant un facteur de différenciation concurrentielle imbattable vis-à-vis des nouveaux entrants…

Barclays

lundi 28 novembre 2016

Paiement et sécurité sont-ils conciliables ?

EBA
Tandis que je réagissais, l'été dernier, aux propositions dangereusement rétrogrades de l'EBA (European Banking Authority) quant à l'application des dispositions relatives à l'ouverture des données des clients inscrites dans la directive des services de paiement (« PSD2 »), des acteurs du e-commerce ont aussi commencé à s'émouvoir, plus récemment.

Directement concerné par le volume de transactions à distance qu'il gère, bien qu'il ne fasse pas partie du « sérail », Visa était le premier à s'inquiéter des nouvelles exigences d'authentification forte que le texte imposerait pour toute transaction d'un montant supérieur à 10 euros. Depuis, avec d'autres, la Fevad (fédération professionnelle du e-commerce) rejoignait le mouvement, en interpellant les autorités sur les déséquilibres introduits par les mesures envisagées et demandant une concertation plus large.

L'enjeu du débat est extrêmement important, car il est connu (et reconnu) que l'ajout d'une étape supplémentaire dans le parcours d'achat des e-consommateurs conduit à des abandons de paniers massifs et, par voie de conséquence, des baisses significatives de chiffres d'affaires. Visa souligne notamment l'impact potentiel sur les sites où des efforts considérables ont été mis en œuvre afin de fournir une solution de paiement en un clic (Amazon n'est pas le seul !), tout en maîtrisant les risques de fraude.

Car les marchands et leurs représentants rappellent que leur approche de sécurité graduée – qui consiste à exiger un complément d'authentification (par exemple via un code 3D-Secure envoyé par SMS) pour les transactions considérées suspectes – constitue aujourd'hui une réponse satisfaisante à la cyberciminalité. Ils ne manquent d'ailleurs pas de s'indigner que ce principe soit entièrement écarté du texte de l'EBA, alors qu'il est explicitement inscrit dans la directive européenne qu'il est censé implémenter.

Naturellement, les intérêts divergents entre les banques et les commerçants seront toujours difficiles à concilier. Alors que les seconds veulent réduire les frictions dans l'expérience client, les premières privilégient exclusivement la sécurité et, de préférence, sans avoir à y consacrer trop de ressources. Pour elles, une authentification forte systématique est la solution de facilité, alors qu'elles sont parfois très attardées – et je suis convaincu qu'il s'agit d'un choix délibéré – en matière d'analyse contextuelle et en temps réel des risques (comme j'ai pu moi-même en faire l'amère expérience).

Cette stratégie pourrait s'avérer extraordinairement dangereuse, d'abord parce que la dépendance excessive vis-à-vis d'un seul mécanisme de protection (non exempt de failles, comme il a été démontré à plusieurs reprises) tient de l'inconscience. Il est au contraire impératif de multiplier les niveaux de défense et de developper les expertises de sécurité dans toutes les directions afin d'être prêt à répondre aux progrès constants des menaces. À plus long terme, il faudrait également préparer les futurs modèles de paiement qui permettront (rêvons un peu) de s'affranchir des problèmes de sécurité.

EBA

dimanche 27 novembre 2016

Trōv lance l'assurance à la demande, avec AXA

Trōv
La startup portait la promesse depuis ses origines, il y a un an et demi. Aujourd'hui, elle la transforme (enfin !) en réalité : grâce à un partenariat avec AXA, au Royaume-Uni, l'application mobile de Trōv est désormais passée de la gestion d'inventaire à l'assurance de biens personnels, en introduisant un niveau de personnalisation inégalé.

Pour mémoire, la solution permettait jusqu'à présent aux consommateurs de maintenir une liste des objets qui leur tiennent à cœur, notamment à des fins de justification en cas de sinistre. Afin de rendre l'opération aussi simple et rapide que possible, l'utilisateur, uniquement armé de son smartphone, dispose de plusieurs moyens de collecte d'informations sur son patrimoine : recherche directe dans la base de données de Trōv, capture (et analyse) de reçu ou de facture, photographie (et reconnaissance) du bien…

Dorénavant, chacun des éléments ainsi enregistrés peut être assuré avec la même facilité. Enfin, presque… Dans un premier temps, seuls les appareils électroniques courants sont pris en compte : téléphones, micro-ordinateurs, appareils photo… parmi une sélection de 30 000 références. À l'avenir (dès l'année prochaine, d'après la communication officielle de l'entreprise), des catégories supplémentaires devraient être progressivement intégrées : équipements sportifs, instruments de musique, bijoux…

En pratique, un glissement de doigt sur un des objets inventoriés donne instantanément accès à un devis personnalisé (ajusté, par exemple, en fonction de l'âge et du lieu de résidence de l'assuré) pour une protection internationale du bien sélectionné, contre le vol, la perte et les dommages accidentels. Par la suite, la couverture pourra être désactivée et ré-activée à la demande, toujours d'un seul geste, en fonction des circonstances ou des préférences du mobinaute.

Trōv

La gestion des sinistres se veut tout aussi accessible : pilotée entièrement depuis l'application mobile, elle est prise en charge par un « chatbot », qui guide le demandeur à travers les différentes étapes de sa déclaration, sous la forme d'un échange de messages textuels, tout en appliquant des règles avancées de détection de fraude. En cas de besoin, il reste toutefois possible de dialoguer avec un conseiller humain.

La solution de Trōv – qui a déjà été lancée en Australie en mai dernier – répond parfaitement aux attentes d'une génération de jeunes consommateurs, qui se défie encore plus que les précédentes de l'assurance et des assureurs traditionnels. Facile à comprendre et à souscrire, mobile et toujours disponible, ultra-personnalisée et sans engagement dans la durée, cette nouvelle manière de protéger ce à quoi ils tiennent correspond aux habitudes que façonne leur environnement « digital » quotidien.

Pour AXA, qui se trouve donc au cœur de cette petite révolution d'une partie de son métier, le partenariat avec Trōv représente une avancée à la fois audacieuse et prudente. Audacieuse parce qu'elle ouvre un territoire inconnu, avec une jeune pousse qui doit encore faire la preuve de la valeur de son modèle. Prudente aussi, car la marque de la compagnie reste, malgré tout, en retrait dans l'initiative, ce qui lui laisse toute latitude de se retirer discrètement si l'expérience prenait une mauvaise tournure…

samedi 26 novembre 2016

L'agrégation de comptes envahit les banques

Linxo
Depuis l'apparition, il y a plus de 10 ans, des premiers outils en ligne de gestion de finances personnelles (PFM), intégrant dans une interface unique les comptes de différents établissements, la plupart des banques en rejetaient le principe, craignant d'inciter ainsi leurs clients à leur faire des infidélités. Apparemment, elles ont retourné leur veste…

En quelques semaines, les annonces de nouveaux services d'agrégation de comptes se sont en effet multipliées parmi les grandes marques hexagonales. HSBC a ouvert [PDF] le bal en octobre, rapidement suivie [PDF] par le Crédit du Nord ; BPCE vient tout juste de se lancer ; tandis que Société Générale indique que son implémentation sera prête au début de l'année prochaine. BNP Paribas et le Crédit Agricole sont, pour l'instant, absents de la course mais ils ne tarderont probablement pas à rejoindre la tendance…

Les fonctions proposées se ressemblent fortement d'une institution à l'autre : l'accès aux transactions de tous les comptes détenus par l'utilisateur permet de lui présenter sa situation financière globale, avec une répartition de ses rentrées et de ses dépenses par grandes catégories. Les écarts se font principalement, notamment pour HSBC, sur une gestion avancée d'alertes et une capacité de prédiction de la position à 30 jours ou encore sur l'intégration dans l'app mobile bancaire (par opposition à une app séparée).

Les stratégies de mise en œuvre s'avèrent nettement plus différenciées. À une extrémité du spectre se trouve BPCE, qui cède, semble-t-il, aux sirènes du « fait maison », quitte à réinventer une roue sans grande valeur ajoutée (à savoir les interfaces « techniques » d'accès aux services en ligne de ses concurrentes). Pour les marques du groupe Société Générale, la solution est une évidence : il s'agit de capitaliser sur l'acquisition de Fiduceo par Boursorama et sur l'expérience acquise par cette dernière.

Enfin, HSBC suit une trajectoire dessinée par plusieurs petites banques pionnières, telles que BforBank et Fortuneo (qui pourraient ouvrir la voie à leurs parentes, Crédit Agricole et Crédit Mutuel Arkéa, respectivement), tout comme la MAIF, avec l'application Nestor qu'elle a déployée ces derniers jours. Toutes utilisent la plate-forme de la jeune pousse française Linxo, qui s'impose donc comme un acteur incontournable du domaine.

HSCB Personal Economy

Toute cette agitation soudaine dans les banques autour de l'agrégation de compte, alors que l'offre des startups existe dans l'hexagone depuis plusieurs années (déjà plus de 5 pour Linxo), a de quoi surprendre. Il paraît assez douteux que l'intérêt du grand public pour ces applications soit un déclencheur majeur. En revanche, la perspective de l'entrée en vigueur, en 2018, de la nouvelle version de la directive européenne des services de paiements (PSD2) pourrait constituer une explication plus convaincante.

L'obligation qu'introduit le texte, pour les institutions financières, d'ouvrir l'accès aux comptes des consommateurs (sur leur demande) à toutes sortes d'entreprises tierces est parfois considérée comme une menace, en stimulant la désintermédiation des banques ou, à tout le moins, en facilitant la mobilité des clients, vers les nouveaux entrants ou vers la concurrence historique. Selon cette logique, la prudence commanderait alors de prendre les devants et d'offrir les services favorisant une plus grande fidélité.

En apparence, le principe est certainement empreint de bon sens. Malheureusement, l'approche retenue reflète un positionnement extrêmement défensif et semble dépourvue de toute ambition. Plutôt que d'aligner leurs services sur des standards datés, dont il est plus ou moins prouvé qu'ils n'apportent que peu de bénéfices concrets à leurs clients, les banques devraient explorer les opportunités réellement innovantes (et hors des sentiers battus) qu'ouvre la PSD2, par exemple en matière de conseil ultra-personnalisé. En ce sens, l'exemple d'ABN AMRO mérite d'être souligné à nouveau.

vendredi 25 novembre 2016

Gradefix rend leur données aux clients

ABN AMRO
À l'ère des « big data » généralisées, les banques cherchent désespérément les usages qu'elles pourraient faire des données de leurs clients sans encourir leur ire… Avec le lancement expérimental de Gradefix, la néerlandaise ABN AMRO tente une approche originale en la matière, au service des consommateurs et des entreprises.

Son principe consiste à proposer à quiconque d'obtenir, en quelques gestes, un score de fiabilité financière, pour son information personnelle ou pour le partager avec un tiers (par exemple pour obtenir un crédit). Pour ce faire, l'utilisateur doit simplement transmettre un historique de ses transactions bancaires, à partir desquels des algorithmes d'analyse, capitalisant sur l'expertise en gestion de risques de la banque, vont déterminer la probabilité qu'il soit à même de faire face à ses obligations, dans la durée.

En principe ouvert en test depuis quelques jours (pour l'instant, il semble uniquement possible d'enregistrer son adresse mail pour être tenu informé), le service est destiné aux particuliers et aux PME. L'ambition, si les résultats du pilote sont concluants, est de leur permettre de disposer d'un moyen simple – et sans équivalent aujourd'hui – de vérifier leur capacité à prendre de nouveaux engagements financiers et, le cas échéant, d'en apporter la preuve, plutôt que d'avoir à fournir des montagnes de justificatifs.

Afin de valider la pertinence du système (aussi bien le format qu'il adopte que la qualité des analyses qu'il délivre), De Hypotheker, un courtier indépendant en crédit hypothécaire (lui-même adepte historique de l'algorithmique appliquée à son métier) a été entraîné dans l'aventure : les outils de ses conseillers pourront intégrer les rapports produits par Gradefix, de manière à optimiser le dialogue avec les clients et affiner les recommandations qui peuvent leur être offertes, en fonction de leur situation réelle.

Gradefix

La démarche proposée, dénuée de tout aspect commercial ou mercantile, repose entièrement sur le volontariat, sans obligation d'aucune sorte, et est d'abord axée sur la restitution d'information (enrichie et valorisée) au consommateur (ou à l'entreprise). En toute logique, elle devrait donc être plutôt bien acceptée. Malheureusement, les réactions du grand public ne sont pas toujours rationnelles et il est possible que des intentions cachées soient attribuées à la banque (qui se protège d'ailleurs un peu de cette menace en détachant sa marque de l'initiative).

Il est ainsi aisé d'imaginer deux scénarios « catastrophes » pour ABN AMRO : d'une part, la capture et l'analyse des données de transactions peuvent soulever des soupçons de conservation et d'usage à des fins inavouées. D'autre part, et c'est le danger le plus réel du dispositif, s'il s'avère efficace, il pourrait être imposé, plus ou moins officiellement (en contradiction avec son caractère facultatif actuel), pour l'accès au crédit (et autres services) par des tiers qui s'économiseraient ainsi une coûteuse gestion de risques…

En tout état de cause, l'expérimentation en cours (?) paraît essentielle pour lever les doutes sur la réception de Gradefix par ses utilisateurs (directs et indirects). Au-delà, il faut également comprendre que, en arrière-plan, l'enjeu est considérable : il s'agit de commencer à explorer les opportunités offertes par la révision de la Directive des Services de Paiement (PSD2) qui entrera en vigueur en 2018, à travers l'obligation qui sera faite aux établissements financiers d'ouvrir l'accès aux données de leurs clients.

jeudi 24 novembre 2016

Authentifier un client par son comportement

Bank Leumi
L'idée consistant à identifier un individu à travers la manière dont il utilise son smartphone n'est pas tout à fait nouvelle. Pourtant, son adoption par la filiale de cartes de crédit de la Bank Leumi au sein de son application mobile serait (apparemment) une première, relativement audacieuse, mais aussi porteuse de grande valeur pour les clients.

Sans surprise, la banque israélienne s'appuie sur l'offre d'une startup locale, SecuredTouch, pour la mise en œuvre de sa stratégie. Vu de l'utilisateur des services mobiles, le fonctionnement du système est invisible : dès l'écran d'accueil et tout au long de ses interactions avec l'application, les particularités de sa manipulation du téléphone sont capturées et permettent, par comparaison avec le profil établi lors des précédentes sessions, de confirmer que la personne connectée est bien celle qui a été autorisée.

La promesse sous-jacente est d'offrir un second facteur d'authentification – comme le réclament avec de plus en plus d'insistance les régulateurs du monde entier – sans aucun impact sur l'expérience client. Afin de réaliser cet exploit, SecuredTouch affirme être capable de valider l'identité d'un mobinaute, en garantissant une fiabilité (presque) totale, grâce à l'analyse d'une centaine de points de mesure différents (taille du doigt, pression exercée sur l'écran, position des zones de contact…) au cours de sa navigation.

SecuredTouch

À défaut d'en admettre le parti-pris, ce positionnement en complément d'un autre dispositif (généralement un mot de passe, éventuellement simplifié, la sécurité étant renforcée par ailleurs) pourra évidemment être perçu comme un défaut, notamment en comparaison des approches biométriques plus classiques (empreinte digitale, reconnaissance faciale, iris de l'œil…). A contrario, il présente cependant l'avantage d'être beaucoup moins exposé aux vols et autres détournements que les systèmes exploitant une seule caractéristique physiologique de la personne à authentifier.

Dans l'état actuel des technologies et face à l'extraordinaire sophistication de certains cybercriminels, les moyens d'identification disponibles sur le web et dans les applications mobiles comportent tous des défauts impossibles à éradiquer. Il n'y a donc pas d'autre choix que de multiplier les strates de défenses. Or, il est essentiel que ces ajouts ne se fassent pas au détriment de l'expérience utilisateur (qui peut rapidement devenir un facteur de désaffection, si elle est dégradée). Voilà pourquoi une solution telle que celle proposée par SecuredTouch est importante pour l'avenir de la banque mobile…

mercredi 23 novembre 2016

SEB veut prédire les besoins de ses clients

SEB
Après une première expérimentation de portée modeste mais très concluante, la banque suédoise SEB est désormais convaincue du potentiel des solutions avancées d'apprentissage automatique (« Machine Learning ») de la jeune pousse Now Interact. Elle a donc décidé de passer à la vitesse supérieure – dans l'analyse prédictive – tout en prenant une part dans le capital de son partenaire.

L'investissement – à hauteur d'environ 1,6 millions d'euros (15 millions de couronnes) sur un tour de table total de 5 millions – est conduit par la branche de capital risque de l'institution, en complément d'une collaboration opérationnelle en pleine expansion. En effet, depuis deux ans, SEB utilise déjà une solution ancienne, et relativement peu évoluée, de la startup pour la distribution de crédits simples. Les résultats en sont néanmoins très positifs, puisque ses taux de conversion ont augmenté de 10%.

Il ne faut pas s'étonner, dans ces conditions, de l'engagement de la banque dans l'étape suivante, à travers la mise en œuvre de la dernière génération d'outils dits d'intelligence prédictive de Now Interact. Ceux-ci reposent sur une approche d'apprentissage continu, dans laquelle les comportements des utilisateurs des services de l'établissement sont modélisés. À partir de la base de connaissance dynamique ainsi constituée, la navigation de tout nouvel internaute donne lieu à une analyse statistique, déterminant la probabilité qu'il accomplisse telle ou telle action (la souscription d'un produit, par exemple).

Non seulement cette capacité peut-elle être mise à profit pour stimuler les ventes – en détectant, en temps réel, les utilisateurs les plus susceptibles de se laisser tenter, puis en leur apportant l'impulsion nécessaire pour emporter la décision – mais elle permet aussi de distinguer ceux qui préféreront finaliser la transaction en toute autonomie de ceux qui devront plutôt être conseillés par téléphone, voire en face à face. Il ne reste plus alors qu'à proposer un complément d'information et un conseil personnalisé, sous la forme la plus adaptée au profil du visiteur, pour augmenter les chances de conclure la vente.

Accueil Now Interact

SEB esquisse de la sorte une nouvelle frontière de l'intelligence artificielle, consistant à approfondir la connaissance intime du client de manière à lui offrir le service dont il a besoin au moment où il en a besoin ET dans les conditions – dont, en priorité, le canal – qu'il préfère. Du point de vue de l'entreprise, ce niveau de personnalisation représente naturellement un moyen de développer son chiffre d'affaire, mais, heureusement, il correspond également au critère de satisfaction utilisateur qui doit en être indissociable.

Incidemment, avec ou sans intelligence artificielle, la démarche illustre très concrètement l'ampleur des évolutions à appréhender pour créer la banque « digitale » de demain. Car, avant de profiter de fonctions prédictives sur les comportements des clients, il faut d'abord disposer d'un catalogue de solutions capables de répondre à la diversité de leurs attentes, il faut savoir en adapter la présentation à leur contexte individuel et il faut, enfin, mettre à leur disposition le niveau de conseil ajusté à leurs préférences. Comme souvent, le plus difficile ne sera certainement pas d'intégrer les technologies…

mardi 22 novembre 2016

Un programme de fidélité pour Samsung Pay

Samsung Pay
Outsider du paiement via mobile aux côtés des ténors que sont Apple et Google, Samsung est le premier des géants du smartphone à introduire un programme de fidélité au sein de son offre. Parviendra-t-il ainsi à séduire les commerçants ? Sera-t-il suffisamment convaincant pour faire décoller l'adoption de sa solution par le grand public ?

La bonne nouvelle à retenir de cette annonce est la prise de conscience par un acteur important du secteur (aussi « exotique » soit-il) de l'impérieuse nécessité d'enrichir sa proposition de valeur pour conquérir des clients. En l'occurrence, Samsung admet officiellement que les systèmes de paiement existants répondent parfaitement aux besoins de leurs utilisateurs (commerçants et consommateurs) et que, en conséquence, il faut trouver de nouveaux arguments pour les inciter à changer leurs vieilles habitudes.

Afin de répondre à ce défi, le fabricant avait intégré les coupons de réduction et les cartes affinitaires dématérialisés dans Samsung Pay. Désormais, aux États-Unis, il propose donc en plus son propre programme de fidélité, basé sur une accumulation de points au fil des dépenses. En réalité, bien qu'elle ne fasse pas partie de l'arsenal de ses concurrents directs, cette approche représente depuis longtemps un classique parmi les nouveaux entrants (il s'agit, par exemple, d'un des piliers de Wa! et Fivory, en France).

En vue d'amorcer le dispositif, les promotions distribuées restent dans l'écosystème de Samsung, qui les finance entièrement, a priori. À terme, les commerçants auront également l'opportunité de participer, à travers des « bonnes affaires » de proximité (motorisées par la géolocalisation du téléphone) ou des compléments de primes.

Samsung Rewards

En pratique, ce programme veut ressembler à ce qui existe déjà outre-Atlantique avec de nombreuses cartes de crédit, ce qui inverse la perspective : pour bien des consommateurs, il ne fait qu'aligner le nouveau moyen de paiement avec l'existant et ne constituera résolument pas un bénéfice supplémentaire. Au contraire, il y a fort à parier que, à moins qu'il ne mette des moyens colossaux dans sa stratégie de conquête, les avantages que Samsung pourra offrir souffriront de la comparaison avec la concurrence.

De manière plus générale, le constructeur aura probablement des difficultés (comme ses confrères) à capter l'attention des commerçants, pour qui la multiplication et l'hétérogénéité des solutions deviendront rapidement un casse-tête incompréhensible. D'autant que celui-ci se répercutera automatiquement sur leurs clients, pour lesquels il faudra disposer du « bon » outil en fonction de son équipement (son smartphone et/ou son – voire ses – porte-monnaie virtuel-s). La qualité de l'expérience s'en ressentira…

En conclusion, Samsung Rewards rejoint une tendance connue et largement explorée. Or, au vu des antécédents, rien ne semble confirmer que l'ajout d'un programme de fidélité dans les services offerts réussisse à stimuler fortement les usages. Dans ce domaine aussi, les habitudes sont bien ancrées et il faudrait apporter une valeur supplémentaire sensible pour justifier la transition vers le mobile. Décidément, il reste encore des idées à trouver avant de changer significativement les pratiques de paiement…

lundi 21 novembre 2016

L'évasion fiscale légitime le bitcoin

Coinbase
Parfois, une mauvaise nouvelle peut être source d'optimisme. Tel est certainement le cas avec la demande émise par le service des impôts américains à une cour californienne d'accéder aux informations des clients de Coinbase, afin d'enquêter sur des présomptions de fraudes importantes. L'évasion fiscale assurera-t-elle la légitimité du bitcoin ?

Pour appuyer sa requête, l'IRS (Internal Revenue Service) révèle plusieurs cas avérés, dont, notamment, deux entreprises qui réalisaient des mouvements sur des comptes séparés, de manière à masquer les revenus générés par leurs transactions en bitcoin, et une troisième ayant utilisé la plate-forme de change de Coinbase pour rapatrier aux États-Unis, en monnaie virtuelle, des fonds mis à l'abri dans un paradis fiscal. L'administration soupçonne que nombre de contribuables échappent de la sorte à sa vigilance.

En effet, l'IRS a établi sa doctrine en la matière dès 2014, qui considère les monnaies virtuelles comme une propriété, dont l'achat, la vente et l'échange sont susceptibles de générer des plus-values directement soumises à l'impôt. Logiquement, ses efforts de lutte contre la fraude porte aujourd'hui en priorité sur bitcoin parce qu'elle est la plus populaire (et la plus négociée) de sa catégorie. En outre, Coinbase constitue la première cible de ses recours en raison de sa position dominante sur le marché (ce qui laisse immédiatement entrevoir les limitations de la démarche…).

Évitons d'entrer dans le débat de la validité de l'action entreprise par l'IRS (que Coinbase considère excessive car indiscriminée). Il reste qu'elle souligne clairement l'importance que prend le bitcoin dans la vie économique d'un pays : si l'administration fiscale se penche aussi sérieusement sur le sujet, et y engage des moyens non négligeables (a priori, car l'exploitation des données demandées ne sera pas triviale), il faut voir là un signal fort et sans ambiguïté du niveau de développement des crypto-devises.

Le constat est le même du côté des fraudeurs. Après tout, il faut une extraordinaire confiance dans un instrument financier pour l'employer à des fins d'évasion fiscale de grande ampleur dans des entreprises ! Si ces dérives n'aboutissent pas à une répression réglementaire brutale (et potentiellement disproportionnée) toujours possible, il faudra se rendre à l'évidence : sans bruit et sans révolution, le bitcoin aura acquis un statut officiel, reconnu à la fois par ses utilisateurs et par une partie de l'administration américaine…

Impôts

dimanche 20 novembre 2016

AXA teste un robot-coach santé

Xtra by AXA
Quand il est question de santé ou d'argent, les mécanismes psychologiques mis en jeu sont tellement complexes que la plupart des initiatives en matière de prévention finissent par échouer. À Hong-Kong, AXA propose aux consommateurs un coach à base d'intelligence artificielle afin de renforcer l'efficacité de son approche.

Même sans être un spécialiste, il est facile de se rendre compte de la difficulté à maintenir l'intérêt des individus pour des programmes destinés à améliorer leur bien-être, qu'il s'agisse de leur santé ou de leurs finances personnelles. Les innombrables solutions proposant des recommandations pratiques, parfois complétées par des mécanismes de récompense, montrent généralement leurs limites : après l'excitation initiale, la lassitude s'installe et mène à l'abandon, faute de résultats probants.

Avec Xtra by AXA, ouvert à tous les Hongkongais (clients ou non), la compagnie d'assurance veut expérimenter une démarche qui permettrait d'éviter cet écueil classique. Pour ce faire, elle s'appuie sur deux leviers principaux : l'hyper-personnalisation et le coaching pro-actif. Concrètement, ceux-ci sont incarnés par un « chatbot » intelligent répondant au nom d'Alex, hébergé au sein d'une application mobile dédiée, dont l'objectif est d'accompagner et de conseiller son utilisateur dans sa vie quotidienne.

Pour l'aider dans sa mission, Alex est capable d'intégrer les données collectées par plus de 200 outils (apps et autres objets connectés) de « mesure de soi » (ou « quantified self »). Y ajoutant les informations recueillies grâce au dialogue permanent qu'il établit (à son initiative, le cas échéant), le « chatbot » acquiert progressivement une connaissance intime de l'utilisateur, à partir de laquelle il va proposer – spontanément – des recommandations pratiques contextuelles (par exemple la suggestion de boire une tisane avant de se coucher, après avoir détecté une durée de sommeil trop courte).

Xtra by AXA

Reposant sur une utilisation pionnière dans son domaine – et, donc, très incertaine – de l'apprentissage automatique (« machine learning », à défaut de véritable intelligence artificielle), le projet est lancé dans un mode purement expérimental, dont le but est de vérifier s'il répond à des attentes réelles des consommateurs. La méthode mise en œuvre est elle-même notable, entre ses cycles d'évolution agiles (durant 6 mois) et un produit minimum viable (« MVP ») dont une partie des fonctions reste aujourd'hui assurée par des humains, en attendant qu'Alex ait acquis une expertise suffisante pour être autonome.

Il est toujours surprenant de voir de grandes entreprises s'enferrer dans des idées existantes dont, pourtant, tout démontre qu'elles n'apportent pas les bénéfices escomptés (l'engouement actuel des banques françaises pour l'agrégation de compte me semble prendre cette dangereuse direction…). Il serait tellement plus raisonnable de chercher systématiquement à capitaliser sur l'expérience acquise et faire évoluer le concept initial de manière à tenter de remédier à ses imperfections ! C'est justement ce que réussit Xtra by AXA, en profitant d'une collaboration avec une startup, pour plus d'impact.

À lire aussi sur Xtra by AXA, cet article de The Digital Insurer.

samedi 19 novembre 2016

Les coulisses de Home for Innovation

BNP Paribas Fortis
À l'occasion de leur quatrième « sprint » de sélection de projets, les équipes de Home for Innovation – le programme d'incubation interne de BNP Paribas Fortis – m'ont invité à leur rendre visite à Bruxelles. Presque deux ans après le lancement de l'initiative, m'était ainsi offerte une belle opportunité de découvrir le chemin parcouru…

Et, autant le dire tout de suite, l'expérience est véritablement impressionnante, ne serait-ce que par l'impact qu'elle a sur la culture d'entreprise. Au travers de ses différentes activités, Home for Innovation a ainsi déjà « touché » plus de 800 collaborateurs, dont la plupart sont devenus, plus ou moins consciemment, des ambassadeurs de l'innovation dans leur environnement quotidien. Le « sprint » organisé du 14 au 16 novembre apportait une preuve incontestable de la transformation qui s'opère dans l'organisation.

Dans le jargon local, le « sprint » est une sorte de marathon au cours duquel les salariés, rassemblés en équipes, conçoivent et raffinent une idée de nouveau produit ou service pour la banque. À l'issue de 48 heures de travail intense, ils présentent leur résultats à un jury chargé de sélectionner celles qui, selon eux, sont les plus dignes d'entrer en phase d'incubation. Signe du succès de l'approche (et de l'engagement des dirigeants de la banque), pour cette édition, plus de 100 participants défendaient 14 projets et la foule se pressait dans l'auditorium pour assister aux « pitches » finaux.

À l'autre extrémité du cycle de création, une des principales améliorations apportées au dispositif concerne l'industrialisation. Tandis que la plupart des démarches du même acabit dans les grands groupes n'aboutissent que rarement à des déploiements concrets, après la réalisation de prototypes, BNP Paribas Fortis confie à sa structure d'innovation la responsabilité (et les moyens) de mettre en œuvre effectivement les projets jugés encore viables et pertinents à l'issue de leur période d'incubation (quitte, parfois, à accompagner ceux qui ne sont pas retenus et que leurs porteurs veulent poursuivre seuls).

Home for Innovation

C'est ainsi que l'une des idées ayant parcouru toutes les étapes du programme – Easy Save (dont les rumeurs affirment qu'elle aurait également remporté le prix du public aux trophées de l'innovation Groupe de BNP Paribas) – va être mise à la disposition des clients de la banque au début du mois prochain. Plus que le produit lui-même (un mécanisme d'épargne automatique des arrondis de dépenses, qui est tout de même original pour une banque), c'est le cheminement du concept à la production qui retient ici l'attention et offre une démonstration de la valeur de Home for Innovation.

Un dernier (pour cette fois) enseignement à retenir de l'initiative de BNP Paribas Fortis est la nécessité de constamment remettre en question ce qui a été fait et qui fonctionne, identifier et remédier aux défauts, petits et grands, expérimenter de nouvelles options… Après tout, l'innovation doit s'appliquer à elle-même ses principes et ses méthodes ! En l'occurrence, Home for Innovation devrait bientôt commencer à ouvrir sa démarche au monde extérieur, au-delà de ses premiers pas avec les accélérateurs Co.Station.

Un grand merci à Kim, Olivier, Corentin, Frédéric… et tous les autres pour votre accueil tout au long de cette journée !

vendredi 18 novembre 2016

Metro Bank déclare sa flamme à AirBnb

Metro Bank
S'il existe bien quelques institutions financières à travers le monde affirmant leur soutien au concept – et, parfois, aux entreprises – de l'économie de partage, la concrétisation en est rarement déclinée dans leur cœur de métier. Metro Bank innove donc en invitant directement la location immobilière entre particuliers dans le crédit hypothécaire.

Certes, la principale nouveauté introduite est liée à une particularité du marché britannique que la « première nouvelle banque créée en 100 ans au Royaume-Uni » essaie de secouer depuis sa naissance, il y a 6 ans (bien avant la vague des néo-banques). De l'autre côté de la Manche, les établissements de crédit imposent en effet aux emprunteurs des clauses restrictives qui vont de l'interdiction pure et simple de louer le bien financé jusqu'à l'obligation de solliciter un accord préalable (souvent facturé).

Alors, dans une véritable déclaration d'amour à l'économie de partage, Metro Bank vient d'annoncer à ses clients détenteurs d'un crédit hypothécaire que, désormais, ils pouvaient mettre leur résidence principale à la disposition des internautes sur les plates-formes AirBnb et équivalentes, sans avoir en demander l'autorisation auparavant. La seule limitation qui subsiste est la durée maximale de location permise, fixée à 90 jours par an (après tout, il faut tout de même conserver l'objet initial de l'emprunt).

Bien sûr, la première justification de cette initiative est la prise en compte d'une réalité incontournable : les pratiques collaboratives sont aujourd'hui entrées dans les mœurs des consommateurs et tenter de les proscrire ou de les restreindre pendant la durée d'un prêt hypothécaire devient une aberration. Mais, à y regarder de plus près, la banque vise probablement aussi un bénéfice concret en adoptant une position plus ouverte, les compléments de revenus issus de la location constituant à la fois des flux supplémentaires pour elle et (surtout ?) une garantie supplémentaire de solvabilité.

Bien que l'idée de Metro Bank ne puisse être répliquée en l'état dans d'autres pays, elle m'inspire deux réflexions. D'une part, en restant sur le même terrain, serait-il envisageable d'introduire les capacités ouvertes par la location entre particuliers dans les plans de financement immobilier ? D'autre part, en prenant plus de recul, il me semble que les banques auraient tout intérêt à se pencher sur les opportunités que leur offre l'économie de partage, non en termes de communication et d'image mais plutôt de business…

Metro Bank

jeudi 17 novembre 2016

Zopa, du P2P lending à la néo-banque

Zopa
Ayant passé la barre du milliard et demi de livres sterling prêtés (en juin dernier), le pionnier du prêt participatif Zopa se sent pousser des ailes. Afin de poursuivre son développement, il annonce [PDF] maintenant son intention d'acquérir une licence bancaire. Un nouvel entrant qui ne ressemblera alors à aucun autre…

Après 11 années d'existence qui valident sans conteste l'expérience de la startup en matière de crédit, aussi bien du côté des emprunteurs que des investisseurs, il est finalement logique qu'elle souhaite pénétrer d'autres marchés, sur lesquels elle pourra continuer à mettre en œuvre son expertise, tout en cherchant à conquérir une clientèle complémentaire à celle du « P2P lending ». Grâce à l'environnement plutôt favorable instauré par le régulateur britannique, l'opportunité est évidemment tentante…

Cependant, en raison de ses origines, la future néo-banque se démarque d'emblée de toutes ses concurrentes. En effet, il n'est pas question ici de focaliser les efforts sur les interfaces de gestion des transactions et sur les moyens de paiement. Résolument ancrée sur son territoire de prédilection, la force de Zopa sera naturellement de proposer, autour d'un compte courant, un nouvel univers de produits d'épargne (notamment autour de la rémunération des dépôts) et de crédit (par exemple à travers des alternatives au découvert autorisé), plus proche des modèles traditionnels du secteur.

Zopa

Un autre avantage sérieux dont dispose Zopa par rapport à la myriade de solutions qui se lancent ces derniers temps (surtout en Grande-Bretagne) est sa clientèle existante. Ainsi, les plus de 63 000 prêteurs et 150 000 emprunteurs qu'elle a servis depuis sa naissance ne sont certes pas très nombreux, mais ils constituent une base solide pour le lancement de sa banque, d'autant que le taux de satisfaction qu'ils expriment est sans commune mesure avec celui observé dans les établissements traditionnels.

Zopa espère obtenir sa licence dans les 15 à 24 mois à venir (la simplification des procédures n'est pas aussi laxiste que certains le croient). Ce délai lui laissera le temps de fourbir ses armes et de développer ses offres. Il permettra également aux « vieilles » banques de se préparer à son arrivée. Car, avec cette deuxième vague de disruption par la FinTech – visant cette fois leur cœur de métier (généralement considéré comme intouchable, jusqu'à maintenant) – la menace sur leurs modèles historiques se précise.

mercredi 16 novembre 2016

Banque Populaire ouvre l'agence au co-working

Mon Bureau Pop
Quand leurs agences se vident inexorablement de clients, les banques ont le choix entre plusieurs solutions. Beaucoup d’entre elles s’engagent dans la voie la plus radicale : la fermeture pure et simple. Plus rares sont celles qui explorent des idées pour re-dynamiser leur parc. Avec « Mon Bureau Pop », Banque Populaire fait partie de ces dernières.

L’idée est simple : la désaffection progressive des agences libère de l’espace, pourquoi ne pas l'exploiter au profit des personnes qui ont besoin d'un bureau temporaire ou d'une salle de réunion en vue d'un rendez-vous important ? Établissement mutualiste oblige, ce sont les sociétaires qui bénéficieront du dispositif, gratuitement. Les locaux étaient disponibles, les équipes d’i-BP (Informatique Banque Populaire) ont développé une application (web et mobile) destinée à gérer les réservations et le tour est joué !

Pour l’instant, un seul espace « de test » est proposé aux utilisateurs, mais deux banques sont déjà sur les rangs pour ouvrir les premières agences opérationnelles. À terme, l’ambition du groupe sera de pouvoir offrir à tous ses sociétaires (quelle que soit leur affiliation) des lieux de passage sur l’ensemble du territoire. La même application leur permettra alors de rechercher et réserver un bureau ou une salle de réunion (ou de « co-working ») partout en France, par créneau horaire (sur une base de demi-journée) et en fonction de l’équipement désiré (vidéoprojecteur, tableau blanc…).

Mon Bureau Pop sur tablette

En pratique, chaque agence ainsi « ouverte » formera un référent, qui prendra en charge l’organisation du planning de mise à disposition des espaces (dans une application de « back-office ») et l’accueil des locataires d’un jour. Enfin, par souci de transparence, directement inspirée par les standards de l’économie de partage, les concepteurs ont intégré la possibilité pour les utilisateurs d’évaluer la qualité de leur expérience, aussi bien du côté des sociétaires (sur les locaux) que des référents (sur les visiteurs).

Bien entendu, il est peu probable que le partage de bureaux constitue une réponse définitive à la baisse de fréquentation des agences. En attendant de trouver celle-ci, l’approche constitue toutefois un excellent moyen d’amortir le choc, tout en apportant une valeur ajoutée aux sociétaires, dont le rôle dans la vie mutualiste de la banque est jusqu'à maintenant mal reconnu, par ailleurs. Et la démarche est d’autant plus pertinente qu’il se développe actuellement une forte tendance – liée à une demande réelle – sur les espaces de co-working et autres modèles de bureaux délocalisés.

mardi 15 novembre 2016

Arity : un assureur invente son futur métier

Allstate
Depuis toujours, l'analyse statistique figure au cœur des métiers de l'assurance. Faut-il alors s'étonner que l'une des plus grandes compagnies américaines, Allstate, crée une filiale technologique dédiée à la conception et la commercialisation d'algorithmes de traitement des données de conduite ? En tous cas, il s'agit d'une première.

Parmi ses activités historiques, Allstate est l'un des pionniers de l'assurance automobile ajustée au comportement (« Pay How You Drive ») et son expérience de l'analyse de plus de 30 milliards de kilomètres parcourus par ses clients avec ses capteurs lui procure naturellement une certaine légitimité en la matière. L'étape suivante était donc, logiquement, de partager cette expertise avec d'autres acteurs, assureurs concurrents, constructeurs automobiles, transporteurs, entreprises de taxis ou de VTC…

Pour ce faire, la compagnie adopte une démarche originale : plutôt que de développer une offre de services en son sein, elle a préféré fonder une « startup » (une qualification à modérer, toutefois, au regard des plus de 200 développeurs, « data scientists » et autres spécialistes des technologies qu'elle emploie d'emblée). Les raisons de ce choix sont multiples, entre la cible de clientèle différente de cette nouvelle entité et le besoin de se démarquer de l'assureur, pour espérer conquérir ses concurrents.

Initialement, Arity aura pour mission principale de continuer à développer ses modèles d'analyse de données et de les mettre à la disposition d'entreprises désireuses d'évaluer et maîtriser les risques automobiles. Aujourd'hui, ses clients sont, évidemment, les différentes marques d'assurance du groupe Allstate. Demain, outre les concurrents de sa parente, la nouvelle venue veut cibler les constructeurs (avec des solutions de prédiction de défaillances, par exemple), les entreprises de transport (notamment pour déployer des systèmes de navigation recommandant les parcours les moins dangereux)…

Arity

Au-delà de cette première phase, l'avenir est déjà tracé. Le président de la structure estime que l'explosion à venir de l'internet des objets conduira à une croissance exponentielle des données disponibles et, en conséquence, des opportunités d'analyse et de découverte de connaissance, qu'il souhaite capter. Encore plus loin, l'arrivée des véhicules autonomes devrait continuer à générer de nouveaux besoins de mesure des risques, susceptibles de définir l'assurance du monde robotisé en gestation.

L'initiative d'Allstate présage en effet d'un avenir (proche) dans lequel l'information et les algorithmes deviendront des actifs essentiels des entreprises, jusqu'à constituer, pour les plus performantes, un des piliers de leur modèle économique. Au passage, notons toutefois un argument moins mercantile offert par l'assureur pour justifier son approche : il espère que la diffusion de son expertise auprès d'un grand nombre d'acteurs contribuera à une réduction globale des sinistres automobiles, au profit de son métier d'origine.

En tout état de cause, sa vision à long terme engendre une dernière excellente raison pour Allstate de créer une filiale afin de développer cette activité émergente. Si celle-ci représente effectivement l'avenir de la compagnie, la disruption qu'elle introduira ne pourra se concrétiser que hors de la « vieille » structure qui, sinon, agirait (consciemment ou non) de manière à freiner le progrès et préserver un intenable statu quo…

lundi 14 novembre 2016

AXA soigne son langage, avec ses clients

AXA
Qui parcourt en détail son contrat d'assurance avant de le signer ? Qui peut garantir qu'il en comprend tous les termes ? C'est pour en finir avec ces questions embarrassantes et génératrices de frustrations qu'AXA entreprend une démarche de rafraîchissement de son langage. Et qui mieux que les clients pouvait aider la compagnie dans ses efforts ?

Le constat de base est presque légendaire : les clauses d'une police d'assurance, rédigées par des juristes (trop) profondément immergés dans leur sujet, sont tellement hermétiques au commun des mortels qu'il est virtuellement impossible de savoir avant la survenue d'un sinistre ce qui sera réellement couvert et dans quelles conditions. Hier encore, on pouvait se permettre de sourire à de telles critiques, même si elles conduisaient à une piètre image du secteur parmi les consommateurs. Dans le monde contemporain, plein de transparence, cette position n'est plus tenable.

Inscrite au cœur de sa stratégie centrée sur les attentes de ses clients, la réponse qu'apporte AXA à cet anachronisme consiste à demander directement aux principaux intéressés – le grand public – ce qui, selon eux, doit être amélioré afin de rendre ses contrats plus clairs, plus compréhensibles et plus proches de leurs préoccupations. Pour ce faire, la plate-forme du programme Assurance Citoyenne (qui fête son premier anniversaire) est mise à contribution. Tous les internautes peuvent ainsi s'exprimer, déposer leurs suggestions et réagir aux idées émises.

Mon Assurance Citoyenne

Dix jours après le démarrage de la campagne (qui s'étalera sur 3 mois, du 3 novembre au 3 février), plus de 250 commentaires avaient déjà été partagés. Conformément à l'habitude dans ce genre d'approche, résolument ouverte et relativement peu cadrée, le contenu des propositions est de qualité éminemment variable. Il ne faut donc pas espérer en tirer (trop) de matière immédiatement utilisable, mais il devrait tout de même être possible d'identifier les causes d'irritation majeures et, le cas échéant, évaluer les réactions aux solutions concrètes qui seront expérimentées sur la plate-forme.

Autant que son objectif de simplification du vocabulaire de l'assurance, la méthode même employée par AXA contribue à restaurer, par l'écoute, la confiance des consommateurs envers une profession qui pourrait se voir menacée, à terme, par l'émergence de l'InsurTech. Cependant, cette formule n'est pas sans danger : pour être crédible et atteindre son objectif, la compagnie devra en effet jouer le jeu de la co-innovation jusqu'au bout et accepter de mettre en œuvre des propositions qui ne correspondront pas nécessairement à ses convictions (ou aux desiderata de ses juristes)…

dimanche 13 novembre 2016

Soldo, une banque pour la famille

Soldo
Si le rythme des créations de néo-banques a ralenti outre-Manche ces derniers temps (probablement en raison d'une certaine saturation du marché), la vague n'est pas encore totalement passée. Il y a quelques jours, Soldo sortait de 18 mois de préparation silencieuse et présentait son premier produit, un compte bancaire pour les familles.

Précisons d'emblée que, comme nombre de ses consœurs, Soldo n'est pas une « vraie » banque puisqu'elle ne détient qu'une licence de monnaie électronique. En conséquence, son offre consiste classiquement en un compte prépayé, auquel sont associées une ou plusieurs cartes de paiement (émises par PaySafe), et piloté par une puissante application mobile. Cette stratégie conduit le fondateur de la startup à la positionner clairement comme un complément aux banques traditionnelles plutôt qu'en concurrente.

Dans cette logique, elle cherche avant tout à répondre à des besoins spécifiques, qu'elle considère mal servis par les établissements existants. En l'occurrence, pour son lancement, sa cible initiale sera celle des familles qui recherchent un moyen de mieux gérer leur finances personnelles. Pour ce faire, elle leur propose une sorte de compte commun permettant d'attribuer une carte à chacun des membres du foyer (à partir de 8 ans, pour les enfants), y compris les employés de maison, le cas échéant.

Malgré les apparences, il ne s'agit pas que d'une simple extension du concept de compte joint. En effet, l'application mobile de Soldo introduit une dimension de contrôle inédite à la solution. Le titulaire – avec les personnes à qui il délègue son autorité, par exemple son conjoint – a ainsi la possibilité de définir exactement les capacités de chacune des cartes : paiement en ligne, retrait sur les automates, utilisation à l'étranger, plafonds de dépense (par période), horaires de fonctionnement (notamment pour une nounou)…

Accueil Soldo

Petite particularité de Soldo parmi les néo-banques britanniques, sa vocation trans-européenne sera une réalité dès ses débuts : son lancement (imminent) est prévu à la fois en Grande-Bretagne (où elle est basée) et en Italie (d'où est originaire son fondateur). D'autre part, outre une future extension géographique, des déclinaisons de son modèle opérationnel son également envisagés. Une de ses ambitions serait, entre autres, de décliner le principe du compte commun à destination des entreprises.

La recette des néo-banques est désormais éprouvée : dans un monde dans lequel la personnalisation des services devient impérative, il devrait être possible de conquérir des clientèles de « niche » (plus ou moins large) en leur proposant une offre adaptée à leur situation et à leurs attentes. Certes, aucune des startups qui ont tenté l'aventure n'a, pour l'instant, confirmé que ce modèle était viable. Toutefois, le succès rencontré par certaines de leurs offres démontrent au moins qu'il existe de réelles opportunités, que les banques classiques tendent à ignorer alors qu'elle sont à leur portée…

samedi 12 novembre 2016

Citi prépare un impressionnant catalogue d'API

Citi
La géante américaine Citi est une nouvelle venue dans le club des banques « ouvertes » grâce aux API (« interfaces de programmation applicative ») mais elle prépare une entrée en fanfare, au vu de l'étendue des services qu'elle exposera, depuis les accès aux situations de comptes jusqu'à l'investissement, en passant par les virements.

Il est vrai que, pour l'instant, l'initiative en est encore au stade des promesses. En effet, les API sont actuellement disponibles uniquement en mode beta privé, donc réservées à quelques partenaires triés sur le volet, et les exemples d'implémentations cités ne concernent qu'un périmètre réduit. Le portail créé pour l'occasion – le Citi Developer Hub – se contente d'inviter les développeurs intéressés à laisser leurs coordonnées, de manière à être tenus informés des évolutions futures, jusqu'à l'ouverture publique.

La prudence qui semble caractériser la démarche est probablement justifiée par l'ambition qu'elle porte. Ainsi, il n'est pas uniquement question ici de permettre à des entreprises tierces d'accéder aux soldes et aux relevés d'opérations sur les comptes courants et de carte de crédit. Et l'interface de paiement par points de fidélité que Citi avait dévoilée plus tôt cette année n'était qu'un hors-d'œuvre à l'impressionnante palette de fonctions évoquée maintenant, organisée autour de 8 domaines d'usages.

Ceux-ci comprennent notamment différents services de paiement – transferts entre comptes, mais aussi virements interbancaires et échanges d'argent entre particuliers. Il serait également possible d'acheter des produits d'investissement ou encore d'intégrer le processus de souscription de carte de crédit avec les API proposées. Naturellement, on peut supposer que toutes ces options ne seront pas mises à disposition de n'importe qui, en production, et les règles de sélection ne sont malheureusement pas explicitées.

Citi Developer Hub

Une autre particularité de l'approche de Citi est sa dimension globale affirmée, même si, là aussi, le démarrage est beaucoup plus mesuré, puisque l'ensemble du catalogue d'API ne sera disponible qu'en Australie et à Singapour, tandis que les États-Unis ne bénéficieront que d'une partie (modeste) de celui-ci. Peut-être faut-il voir dans ce choix une deuxième mesure de précaution, qui consisterait à déployer les interfaces sur des marchés moins « sensibles » afin d'évaluer la réponse des utilisateurs et appréhender sur le terrain les éventuels problèmes à traiter, sans prendre de risque trop important.

Il faut enfin noter que les objectifs de Citi sont particulièrement ciblés. Jamais ne sont envisagées, dans la communication officielle, les opportunités de l'innovation ouverte ou de collaborations avec des acteurs externes. La seule motivation affichée est de répondre à une demande de la part d'une nouvelle catégorie de clientèle : en 2016, la commercialisation de services financiers passe aussi par l'exposition d'API. Les banques qui renâclent à lancer leur propre initiative devraient en prendre de la graine…

vendredi 11 novembre 2016

Élections américaines et robo-advisors

Yomoni
Le vote britannique en faveur du Brexit au mois de juin dernier constituait une répétition, les élections américaines ont offert l'occasion aux robo-advisors français d'affiner leurs méthodes et se démarquer un peu plus des approches traditionnelles des acteurs de l'assurance-vie. Yomoni et WeSave*, en particulier, sont en pointe de la transparence.

Ainsi, à la veille du scrutin, lundi 7 novembre, tous deux publiaient un article d'analyse (ici pour WeSave et pour Yomoni) destiné à éclairer – sinon rassurer – leurs clients sur les enjeux et les conséquences possibles du vote américain sur leurs portefeuilles, dans les deux hypothèses de résultats. Le lendemain de la victoire surprise de Donald Trump, ils renouvelaient l'exercice, en exposant leurs visions détaillées des tendances (ici pour Yomoni et pour WeSave) et de leurs stratégies à court et moyen terme pour protéger les actifs des investisseurs qui leur font confiance.

Yomoni profitait même de l'importance de l'événement pour inviter les épargnants à une conférence en ligne, au cours de laquelle Mourtaza Asad-Syed, son co-fondateur et directeur des investissements, présentait son analyse et répondait aux questions posées par les participants. WeSave n'était pas en reste, en proposant à ses clients – en ligne avec son positionnement sur une relation mixte humaine et « digitale » – de contacter ses conseillers, par mail, par téléphone ou par Twitter, pour un échange approfondi.

Billet de blog WeSave

C'est bien dans la proximité avec les préoccupations de leurs clients – qu'ils expriment à travers une communication adaptée et délivrée au bon moment – que les robo-advisors développent leur avantage concurrentiel, beaucoup plus que par leur tarification avantageuse. En effet, si les épargnants ont conscience, confusément, que l'arrivée d'un nouveau président américain « atypique » va affecter leurs investissements, la plupart n'en maîtrisent pas les ressorts et en ressentent de l'inquiétude. Ils seront donc reconnaissants aux experts qui tentent de les rassurer en temps utile.

Bien sûr, il reste encore des opportunités à explorer. Par exemple, les explications fournies par les spécialistes des deux startups seront probablement considérées comme trop techniques par une partie de leurs clients. Pour ces derniers, il est peut-être nécessaire d'adopter un discours plus simple, plus direct et ajusté en selon leur situation individuelle (et leur portefeuille). Idéalement, il devrait être possible de « deviner » les questions que se pose chacun d'eux et leur apporter une réponse par anticipation.

Quoi qu'il en soit, la différence avec les établissements historiques est déjà criante. La plupart de ceux-là se contenteront de transmettre un rapport trimestriel standardisé, résumant en quelques lignes les péripéties survenues plusieurs semaines ou mois auparavant. Pourtant, est-il si difficile de se mettre un instant à la place de l'investisseur et d'appréhender ses attentes ? Non seulement est-ce là la base d'un service de qualité, cela représente aussi un excellent moyen de resserrer les liens avec les clients…

* Clause de transparence : je fais partie (bénévolement) de l'advisory board de WeSave.

jeudi 10 novembre 2016

Et qui contrôlera l'intelligence artificielle ?

CFTC
Devant la montée du trading algorithmique et les risques d'instabilité qu'il génère, la CFTC – régulateur américain des marchés de futures et de swapsveut se réserver un accès aux codes sources des intervenants afin d'assurer sa mission de surveillance. La décision soulève l'indignation. Pourtant, il s'agit d'une bataille d'arrière-garde…

Le débat est, malgré tout, intéressant. D'un côté, les autorités veulent à tout prix éviter les incidents de type « flash crash » causés par des emballements incontrôlés de logiciels de trading à haute vitesse comportant d'inévitables erreurs de programmation. De l'autre, les auteurs de ces mêmes systèmes automatiques désirent légitimement protéger leur propriété intellectuelle et ne pas laisser les yeux indiscrets des experts désignés par la CFTC explorer les secrets de ce qui constitue leur avantage concurrentiel.

Mais, immédiatement, on peut se demander à quoi la réglementation proposée pourrait bien servir. S'il s'agit de déterminer les causes et les responsabilités en cas de perturbation avérée, l'objectif initial de protection des marchés n'est pas rempli. S'il est question de sonder – plus ou moins aléatoirement – les algorithmes déployés en production, de manière à mesurer les risques qu'ils portent, l'ambition est démesurée, relevant de la proverbiale aiguille dans une botte de foin, qui, de plus, se déplacerait régulièrement (les algorithmes ne sont pas figés pour l'éternité) !

Plus embarrassant, les modèles mis en œuvre dans les outils les plus avancés deviennent extraordinairement complexes, et les personnes capables d'en comprendre le fonctionnement sont peu nombreuses (et employées, à prix d'or, par les banques et autres fonds d'investissement). Il semble donc imaginable que, dès aujourd'hui, l'inspection des logiciels qui régissent (en partie) les marchés financiers soit, en pratique, impossible. Regardons alors vers l'avenir : la situation va certainement empirer…

En effet, les premières applications concrètes de l'apprentissage automatique – sans même parler d'intelligence artificielle – arrivent déjà dans le trading. La conséquence ? Il n'existe plus vraiment d'algorithme à contrôler : à partir de l'information qu'il capte et analyse, le système engrange de l'expérience, de manière autonome, qu'il va ensuite exploiter pour réaliser, seul, les opérations qu'il considère devoir mener aux résultats demandés par ses concepteurs. Personne ne connaît le « raisonnement » appliqué !

Soulignons ici que le problème ne concerne pas uniquement le secteur financier. Partout où l'intelligence artificielle s'infiltre, comment va-t-on s'assurer que la loi et les principes moraux sont respectés ? La presse a évoqué, par exemple, le biais qu'introduisent les algorithmes de Google lorsqu'ils proposent des postes mieux rémunérés aux hommes, par rapport aux femmes. Qui saura prouver que le code est responsable de cette anomalie ? Le déséquilibre ne provient-il pas du contenu des annonces publiées ?

Pour l'instant, les seules solutions envisagées consisteraient à s'en remettre à d'autres algorithmes – spécialisés dans le contrôle réglementaire – pour détecter les éventuelles infractions commises. Cependant, outre la difficulté que représenterait cette approche et son absence de réponse à la question de la responsabilité (dont un effet collatéral pourrait être une uniformisation du monde), on voit bien la boucle dans laquelle elle nous entraîne : qui produirait ces logiciels et qui en garantirait l'intégrité et la qualité ?

Intelligence Artificielle (illustration par geralt - https://pixabay.com/fr/users/geralt-9301/

mercredi 9 novembre 2016

Leçons à tirer du cyber-casse de Tesco Bank

Tesco Bank
Le scénario de ce qui est probablement le premier e-braquage de banque du monde – ayant affecté les clients de Tesco Bank – n'est pas entièrement connu à cette heure. En revanche, les conséquences pour les victimes sont déjà très visibles et donnent à réfléchir sur la préparation aux situations de crise dans les institutions financières…

Rappelons rapidement les faits. Durant le week-end du 6-7 novembre, environ 9 000 comptes courants se sont vus délestés de sommes comprises entre une vingtaine et plusieurs centaines de livres sterling (270, en moyenne, le préjudice total étant estimé à 2,5 millions de livres). Une partie des services en ligne étaient alors fermés, préventivement, et un renouvellement des cartes des personnes ciblées était initié. Le lundi matin, la banque a émis une alerte générale, faisant état d'une cyber-attaque (sans autre précision) ayant visé plus de 40 000 comptes, au total.

Sans plus de détails sur les circonstances, je ne me hasarderai pas dans ce billet à conjecturer sur la sécurité informatique de Tesco Bank. En revanche, les réactions des consommateurs aux désagréments qu'ils subissent recèlent un trésor d'information dont il serait dommage de ne pas profiter. Trois constats ressortent plus particulièrement : un certain fatalisme quant à l'incident lui-même, la frustration face aux difficultés rencontrées pour contacter la banque et l'angoisse de ceux qui n'ont plus accès à leur argent.

Ainsi, les critiques les plus véhémentes émanent des clients dont Tesco est la banque principale et qui se retrouvent dans une situation difficile, incapables de régler leurs dépenses courantes en attendant que leur carte de paiement soit remplacée (le délai annoncé étant d'une dizaine de jours). À ceux-là, viennent naturellement s'ajouter ceux dont le compte a été presque entièrement vidé et qui se demandent à quelle échéance le remboursement promis sera effectif (en l'occurrence, il est intervenu le 8 novembre).

Tesco Bank

La deuxième grande source des mécontentements exprimés est liée au gigantesque débordement de capacité du centre d'appel de la banque, nombre d'internautes signalant un temps d'attente d'une heure ou plus. Les difficultés auraient été suffisamment gênantes s'il ne s'était agi que de rassurer des clients inquiets pour leur porte-monnaie, elles ont été rendues d'autant plus insupportables que la campagne d'alertes individuelles aux victimes présumées leur demandait de prendre contact avec un conseiller !

Que faut-il retenir de cette expérience ? En premier lieu, la survenue d'un cambriolage électronique dans une banque ne paraît pas surprendre les consommateurs. En revanche, ce qui les préoccupe majoritairement est d'en connaître les conséquences pratiques pour eux, personnellement. Et les solutions proposées ne les satisfont que si elles sont mises en œuvre rapidement. Promettre un remboursement ne suffit pas, il faut une échéance. Laisser les clients sans carte pendant 10 jours est inacceptable.

Partant de ces constats, on peut dégager quelques recommandations importantes à destination de toutes les institutions financières. Car, bien que la tentation soit forte de stigmatiser un établissement « hors système » (issu d'une grande chaîne de distribution), il serait extrêmement présomptueux de croire qu'un tel incident ne peut atteindre les acteurs historiques. Or, dans cette hypothèse, avec des millions de comptes gérés au lieu de quelques dizaines de milliers, l'ampleur du désastre pourrait être démultipliée.

La transparence est évidemment la première consigne à appliquer dans ces circonstances. Tesco Bank était plutôt bien armée en la matière, apparemment, mais les dispositions prises étaient en dessous des attentes, en termes de délais et, surtout, de coordination entre les messages délivrés et les capacités de traitement disponibles. Enfin, la stratégie de remédiation comporte une faille critique (pour les clients restant sans moyen de paiement), pour laquelle aucun mécanisme de secours n'est prévu.

En résumé, comme il est d'usage avec les risques systémiques, les scénarios de cyber-attaques devraient faire l'objet d'évaluations, d'élaboration de plans de défense et d'exercices périodiques. Je ne suis pas certain que ce soit le cas aujourd'hui…